Partie 1 : le contexte historique
PREMIÈRE PARTIE
LE CONTEXTE HISTORIQUE
1. LE 19e SIÈCLE ET AVANT : DEUX MOTS, UNE SPECIALITÉ
Les racines de l’histoire que nous évoquerons réfèrent à deux mots nouveaux. Le premier de ces néologismes est le mot «orthopédie». Il est apparu sous la plume de Nicolas ANDRY (1658- 1742), qui publie en 1741 son ouvrage fameux, «L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger dans les enfants les difformités du corps»8. Ce livre affiche la gravure de l’arbre redressé, qui deviendra le symbole de la spécialité et se retrouveradans le sceau de la plupart des associations professionnelles et scientifiques en rapport avec la spécialité.
Le second terme qui retient notre attention est le mot « ostéosynthèse ». Ce vocable est crédité à AlbinLAMBOTTE (1866-1956)9, qui l’utilise à partir de 190410. Il précise même en 190711 qu’il l’emploie pour qualifier autrement une évolution de la suture osseuse décrite en 1870 par BERENGER-FERAUD (1832-1900)12.
Dans les pays latins, l’orthopédie est associée depuis longtemps à la traumatologie de l’appareil locomoteur, alors que dans les pays de langue allemande, la traumatologie est restée longtemps une discipline à part, prenant en charge les traumatisés dans leur globalité. La chirurgie orthopédique d’aujourd’hui prend donc en charge les malformations et les lésions dégénératives et inflammatoires, ainsi que les traumatismes de l’appareil locomoteur au sens large, puisqu’il inclut les téguments et les nerfs périphériques. Le chirurgien orthopédiste n’utilise pas seulement les techniques chirurgicales mais aussi les traitements conservateurs par appareillage et immobilisation. Notre propos est de faire état de l’apport des médecins belges à la discipline. La bataille de Waterloo, en 1815, aamené brutalement un nombre considérable de blessés. Cette catastrophe humaine a généré des fractures ouvertes dont le traitement final était bien souvent l’amputation, avec une mortalité de 30 à 45 %. Dans les fractures complexes de l’extrémité supérieure du fémur, la mortalité atteignait selon certaines sources les 100%, par choc ou par septicémie. C’est le nom du Baron Dominique LARREY (1766-1842) qui vient d’abord à l’esprit lorsqu’on évoque cette traumatologie de guerre.
L’immobilisation des fractures, quant à elle, fait référence en premier lieu à Pierre Joseph DESAULT (1738-1795) et à son bandage13, encore utilisé de nos jours.
Des médecins « locaux » belges et hollandais ont contribué à l’amélioration du traitement conservateur des fractures à cette époque. Nous évoquerons leur contribution. Mais il convient de retourner d’abord aux sources et de commencer ce chapitre sur les précurseurs par le souvenir de Nicolas ANDRY.
2. NICOLAS ANDRY (1658-1742) ET SON ARBRE
Nicolas ANDRY est donc l’inventeur du mot « orthopédie », terme qu’il destinait à désigner les traitements chez l’enfant. Né en 1658 à Lyon, c’est là qu’il entame ses études14. Il s’engage d’abord dans des études de théologie, qu’il ne poursuit pas, pour se diriger ensuite vers la médecine, dont il entame l’étude à la Faculté de Reims. Il poursuit ensuite à Paris. Il y soutient une thèse en 1697. Peu affable avec ses confrères et avec les chirurgiens barbiers, il a une carrière tumultueuse.
Suppléant (1701) puis titulaire de la chaire de médecine au Collège de France, enfin Doyen de la Faculté et critique au « Journal des Savants », il finit par devoir démissionner ou se voir exclu de ces différentes fonctions15. En raison de la publication de son ouvrage intitulé « De la génération des vers dans le corps de l’homme. De la nature et des espèces de cette maladie, les moyens de s’en préserver et de la guérir »16, il est en quelque sorte considéré comme le père de la parasitologie, bien que les spécialistes d’aujourd’hui ne le prendraient pas très au sérieux à cause de certaines visions plutôt fantaisistes. Pour ne citer qu’un exemple, rapportons qu’il croyait que les parasites pouvaient changer de forme avec l’âge et devenir soit des grenouilles, soit des lézards, ou encoredes scorpions17.
ANDRY écrit encore d’autres ouvrages mais c’est avant tout le dernier d’entre eux qui nous intéresse ici, puisqu’ilest intitulé «L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger dans les enfants les difformités du corps. Le tout par des moyens à la portée des pères et des mères et de toutes les personnes qui ont des enfants à élever»18. Nous avons déjà cité plus haut cet écrit. Edité initialement à Paris en 1741, ce traité connait un grand succès et est publié en plusieurs langues au cours des années suivantes. Cet ouvrage, consacré à la prévention desdéformations décrit des conseils positionnels qui restent tout à fait pertinents mais, à côté de cela, dans l’air du temps, l’auteur s’attarde à des moyens traditionnels surannés et émet des considérations appuyées sur la beauté de l’enfant19 et, comme il l’écrit lui-même, « Il faut éviter… de négliger son corps au point de vue de laisser devenir difforme ; ce seroit contre l’intention du Créateur. C’est sur ce principe qu’est fondée cette Orthopédie ». La notiond’orthopédie se rapporte essentiellement à l’enfant. Quant au mot orthopédie, il explique lui-même dans la préface de son ouvrage comment il l’a formé… Les hellénistes en reconnaîtront aisément les racines : ὀρθός (« ortho »,droit) et παῖς (« pais », enfant). En fait, c’est par référence aux titres d’écrits dus à deux prédécesseurs, auteurs ayant abordé des questions concernant les enfants, qu’ANDRY a forgé son néologisme. Il s’agit de la « Pédotrophie», publiée par un certain Scévole de SAINTE-MARTHE20 en 1584 sur « La manière de nourrir les enfans à la mamelle » et de la « Callipédie » de Claude QUILLET sur «Les moyens d’avoir de beaux enfans» éditée en 165621.
Il reste à dire un mot de ce fameux « arbre tors » dont de nombreuses sociétés scientifiques de chirurgie orthopédique ont fait leur emblème. Beaucoup considèrent que cet arbre et son tuteur évoquent la scoliose qu’il faut redresser. Rien n’est plus faux22. Si on consulte son ouvrage, on retrouve cette illustration à la page 252 (édition 194323), à propos de ce qu’il appelle … les jambes courbes.
3. APPORTS BELGES AU TRAITEMENT NON OPERATOIRE DES FRACTURES
André VÉSALE (1514-1564) et le blanc d’œuf
André VESALE (en flamand Andries VAN WESEL) naît en 1514 dans le Brabant flamand, près de Bruxelles, A l’époque, ce territoire fait partie des Pays-Bas espagnols, qui dépendent eux-mêmes du Saint Empire romain germanique. VAN WESEL latinisera son nom en VESALIUS, pratique courante à l’époque. VESALE provient d’une famille rhéno-flamande de savants originaires de Wesel, en Rhénanie inférieure. Son arrière-arrière-grand-père Pierre WIJTING (dit VAN WESEL en raison de son village d’origine) était médecin de Frédéric III (1415-1493) ; son grand-père, qui était médecin lui aussi et astrologue de Maximilien d’Autriche24, enseigne à l’Université de Louvain. Et son père Andréas est apothicaire de Marguerite d’Autriche, tante de Charles Quint25.
La maison familiale est située à proximité du gibet, lieu où se déroulent les exécutions. Certains se demandent si ce n’est pas là que naît sa curiosité pour l’anatomie, les corps des pendus restant exposés au gibet jusqu’à décomposition… et dépeçage par les oiseaux. En réalité, la tradition considère plus généralement que c’est au cours de ses études littéraires à Louvain que cet intérêt émerge dans l’esprit de Vésale. Il part donc pour Paris en vue de recevoir une formation en médecine. Après diverses péripéties de lui-même et de l’Histoire, il revient à Louvain pour obtenir son baccalauréat en médecine. Puis il obtient son doctorat à l’Université de Padoue, où il est nommé professeur d’anatomie26.
VESALE révolutionne alors l’anatomie, notamment en corrigeant les erreurs de GALIEN. Son ouvrage, le « Dehumani corporis fabrica libri septem27 » connaît un succès retentissant, tant auprès de partisans que de détracteurs de son contenu. Mais ce qui nous intéresse ici, c’est son attitude devant la prise en charge des fractures et luxations. VESALE, en effet, n’est pas seulement un remarquable anatomiste mais encore un clinicien brillantpour son époque28. En traumatologie, il a déjà l’idée d’affermir les pièces de pansement du membre fracturé au moyen d’une solution concrescible. Et de proposer d’entourer les membres luxés ou fracturés de bandes enduites de blanc d’œuf29. Mais nous devons à l’honnêteté de préciser que c’est avant tout dans les fractures du nez et dans les luxations de la mandibule que VESALE préconise ce procédé. Par ailleurs, il n’est pas le seul à utiliser cette technique : son contemporain Ambroise PARE le fait aussi. Mais Adolphe de BURGGRAEVE y voit un signe avant-coureur des méthodes modernes. Il écrit dans ses « Etudes sur Vésale » : « On voit percer ici l’idée de l’appareil inamovible perfectionné de nos jours par un autre belge, M. le docteur SEUTIN. »30
Louis-Joseph SEUTIN (1793-1862) et le bandage amidonné
Louis SEUTIN naît à Nivelles en 1793. Encore élève, il fréquente très tôt le cabinet du chirurgien local, le frère de son maître d’école. En 1810, il part suivre à Bruxelles les cours de l’Ecole de Médecine de l’Université Impériale. Deux ans plus tard, il est admis comme externe de l’hôpital St-Pierre. Tiré au sort pour le service militaire, c’est avec un brevet de chirurgien-aide-major qu’il rejoint l’armée impériale du Main, cantonnée près de Leipzig. Sousles ordres de Larrey et de Percy, il est affecté aux ambulances, où il fait ses premières expériences de la chirurgie de guerre. Il est fait prisonnier. Après deux ans, il revient à Bruxelles et est nommé par le Gouverneur des Pays-Bas chirurgien-aide-major à l’hôpital militaire. En 1815 à Waterloo, il reçoit la mission d’organiser les ambulances dans les communes voisines du champ de bataille. Par la suite, il termine ses études de médecine à Leyde et à Liège. De retour à Bruxelles, en 1822, il participe à la fondation de la Société des Sciences médicales et naturelles de Bruxelles et est nommé chirurgien en chef de l’hôpital St-Pierre. Dès 1824, il est chargé, à l’Ecole de Médecine, des cours de médecine opératoire, d’accouchement et des maladies des femmes et des enfants. A la révolution de 1830, il est nommé chirurgien en chef de la garde urbaine puis, le 9 février 183131, médecin en chef de l’armée. En 1834 à la fondation de l’Université Libre de Bruxelles, il occupe la Chaire de Clinique chirurgicaleet de Médecine opératoire.
Ses contributions à la chirurgie orthopédique sont particulièrement originales. C’est en 1835 qu’il publie pour la première fois, dans le Bulletin médical belge,32 sur sa trouvaille concernant l’usage d’un bandage amidonné pourla contention des fractures. Entre autres réalisations, il procède à la résection de la tête fémorale en cas de fracture comminutive, préconise la résection sous- périostée, et surtout, développe sa méthode amovo-inamovible, ancêtre du plâtre, permettant la stabilisation des fractures en conservant aux patients une33 relativemobilité.
Il parcourt l’Europe en défendant les avantages de son appareil amidonné, qui est adopté dès 1837 par l’armée russe. En 1840, il publie une synthèse de sa méthode dans un ouvrage intitulé “Du bandage amidonné ou recueil de toutes les pièces composées sur ce bandage depuis son invention jusqu’à ce jour, précédé d’une esquisse historique et suivi de la description générale et du mode d’application de l’appareil dans les fractures et les pansements”34.
De ses nombreuses représentations internationales, il fut selon ses propres paroles « fier surtout d’avoir contribué à rehausser à l’étranger la contribution de la chirurgie belge ». Elu au Sénat, il contribue à de nombreuses révisions de l’art de guérir et, en 1847, le Roi Léopold lui confère le titre de Baron. L’année suivante, Louis SEUTIN utilise le chloroforme pour anesthésier un enfant présentant une fracture de la jambe35. Il s’éteint à Bruxelles en 1862.
André UYTTERHOEVEN (1799-1868) et la gutta percha
L’idée d’une fixation nécessairement solide a fait son chemin tout au long du XIXe S. Après le bandage amidonné proposé par Louis SEUTIN, un autre de nos compatriotes, André UYTTERHOEVEN a tenté d’améliorer les moyens de contention avec la gutta percha36. Né à Bruxelles le 2 février 1799, il était membre honoraire de l’Académie de Médecine et professeur à l’Université de Bruxelles. Ses « spécialités » étaient la chirurgie, l’ophtalmologie et la médecine mentale. Il est décédé en 186837.
Ses tentatives sont quasiment contemporaines de la trouvaille de MATHIJSEN, dont nous parlons au paragraphe suivant, puisqu’il publie sur ce sujet en 185138, soit un an avant son challenger. Le Journal de Pharmacologie évoque une lettre d’UYTTERHOEVEN, en date du 6 décembre 1848 alors qu’il était chirurgien en chef à l’hôpital Saint-Jean de Bruxelles. Dans cette lettre, il informe la compagnie39 « qu’il vient de faire l’application de la gutta percha comme moyen de déligation dans un cas de fracture du péroné avec luxation du pied », et l’invite à «déléguer quelques- uns de ses membres à l’effet de juger du degré d’utilité de ce nouveau mode de pansement »40. Le Journal de Médecine, de Chirurgie et de Pharmacologie précise au même moment que les Docteurs BOUGARD, JOLY et BIVER sont désignés pour suivre les expériences entreprises par UYTTERHOEVEN41.
La question de l’utilisation de la gutta percha dans la contention des fractures fit long feu puisque peu de tempsaprès, MATHIJSEN amena dans la pratique le recours au bandage plâtré. Quelques irréductibles l’évoquèrentencore tardivement dans leurs publications, tel le Docteur Félix PAQUET en 185542. A notre époque, elle est utilisée en endodontie pour la « consolidation des racines dentaires » mais cet usage ne fait pas l’unanimité43.
Antonius MATHIJSEN (1805-1878) et le plâtre de Paris
Antonius MATHIJSEN (ou MATHYSEN) et sa contribution ont fait l’objet d’une publication illustrée dans les Acta Orthopaedica Belgica en 194844. Né en 1805 dans le village néerlandais de Budel, près de la frontière belge, il suit sa formation de médecin à Maastricht, puis à Bruxelles et enfin à l’école médicale militaire d’Utrecht. Devenu ainsi officier médical de l’Armée Royale Néerlandaise en 1828, il participe à la bataille de la Révolution belge.
On ne peut pas dire, à proprement parler, qu’il soit un compatriote. Ce serait même le contraire puisqu’il était militaire au service du Roi des Pays-Bas. Mais il a été étroitement mêlé à la vie de notre pays et l’importance de son apport dans le traitement des fractures ne nous permet pas de passer son existence sous silence. Soit dit enpassant, l’ampleur de cet apport et les circonstances de la vie de MATHIJSEN lui ont valu d’avoir son nom dans une rue de chacun des deux pays, la Belgique et les Pays-Bas.
MATHIJSEN fut en effet le premier à avoir l’idée d’utiliser le plâtre de Paris comme bandage destiné àl’immobilisation des fractures, ce qui paraît-il, lui a valu le surnom de « Oom Gips » (Oncle Plâtre)45. C’était en 1851.C’est alors qu’il exerçait son art à l’hôpital militaire de Haarlem qu’il eut cette idée46, alors que le bandage amidonné de SEUTIN était en vogue. Il utilisa le même principe que SEUTIN mais au lieu d’amidon, c’est un bandage de jutetrempé dans le plâtre et l’eau, mis en place sur le membre fracturé et ensuite durci en quelques minutes, qui lui permit d’obtenir l’immobilisation. Il avait d’abord testé sa méthode sur des poulets. Il a publié sa technique en 185247.
4. LA NAISSANCE DE L’OSTEOSYNTHÈSE
L’idée de maintenir en place et de solidariser les fragments osseux en cas de fracture est, en réalité, assez ancienne. Néanmoins, jusqu’à la moitié du XIXe siècle au moins, le traitement des fractures était resté de type non chirurgical. L’intervention en orthopédie était grevée de deux hantises majeures : celle de la douleur et celle de l’infection. Aussi, la plupart des opérations étaient-elles malheureusement des amputations. En dehors de cela, seuls quelques rares cas de ce qu’on appellera plus tard des pseudarthroses, étaient traités de manièresanglante48. Ce n’est qu’à la fin de ce siècle-là et au début du vingtième siècle que les premières tentatives de fixation à l’aide de pièces métalliques firent leur apparition49. Dans son livre « Chirurgie opératoire des fractures »publié en 1913, Albin LAMBOTTE, précurseur de la discipline, aborde à travers ce qu’il appelle une « simple esquisse », l’histoire de la chirurgie des fractures, « remontant ainsi jusqu’à Hippocrate et même au-delà », nous explique Edouard VANDER ELST, secrétaire Général de la SOBCOT en 197150. Plus près de notresiècle, LAMBOTTE mentionne les tâtonnements de quelques chirurgiens (John KEARNEY RODGERS en 1825, Valentine MOTT en 1831 et John CHEESEMAN en 1838 aux Etats Unis, Achille-Cléophas FLAUBERT, le père du romancier, en France en 1835 et 1838) s’attaquant à des cas de pseudarthrose.
Par ailleurs, VANDER ELST citant LAMBOTTE nous rappelle également les débuts de la chirurgie des fracturesrécentes qui, quant à elle, dut attendre 1847 pour voir la création des « griffes » de MALGAIGNE ainsi que l’apport d’autres timides précurseurs. En 1870 paraît, sous la plume de BERANGER FERAUD, le « Traité de l’immobilisation directe des fragments osseux dans les fractures »51, que LAMBOTTE considère comme le premier traité d’ostéosynthèse. Il y est en effet question de « suture des os ». Progressivement, mais non sans d’âpres controverses, naît l’idée de la suture osseuse primitive. Plusieurs grands noms y contribuent, toujours selon LAMBOTTE. Ce fut le cas de Joseph LISTER et Hector CAMERON en Grande-Bretagne, en 1872 et en 1877respectivement. Puis Bernhard von LANGENBECK, Franz KOENIG et Thémistocle GLUCK dans les pays de langue allemande, Louis-Léopold OLLIER, Théodore TUFFIER et Paul ALGRAVE en France, sir William ARBUTHNOT LANE et d’autres en Angleterre, se lancent sur la même voie. Tant et si bien que, vers la fin du XIXe siècle, l’idée était dans l’air. Comme toujours en matière de progrès scientifique, vient alors à point nommé un esprit génial qui collecte et cristallise les éléments épars pour les fondre en un tout solide et forger un ensemble inébranlable.
Ainsi fit Albin LAMBOTTE, en Belgique, pionnier de l’ostéosynthèse. Les dessins qui illustrent ses publications etont été reproduits dans les ouvrages commémoratifs du 50e52 et du 75e anniversaire de la SOBCOT le prouvent à suffisance53.
5. LES PRÉCURSEURS
Nombreux sont les chirurgiens aux noms prestigieux qui ont contribué au développement de la fixation des fractures. Quelques-uns ont été cités ci-dessus … L’apport d’Albin LAMBOTTE sera présenté en détail plus loin. Cependant, dans un ouvrage consacré à l’orthopédie et à la traumatologie belges, nous nous devons d’évoquer deux de nos compatriotes figurant parmi les grands précurseurs, l’objectif étant de retracer dans ce chapitre la filiation des idées plutôt que l’histoire complète.
Antoine DEPAGE (1862-1925) et la traumatologie de guerre
Antoine DEPAGE naît à Boitsfort le 28 novembre 1862. Il passe avec difficulté ses années d’athénée et ses premières années de médecine à l’ULB. Son choix pour la médecine n’était pas précisément motivé au début par un sentiment de vocation puisqu’il aurait, selon ses propres dires, répondu au secrétaire qui lui demandait dans quelle faculté il souhaitait s’inscrire, que ce serait « celle dont les frais d’inscription sont les moindres ». C’est la rencontre de professeurs comme Paul HEGER et Victor DESMETH qui éveille son intérêt pour les sciences, puis Jules THIRIAR stimule son goût pour la chirurgie. Ce dernier deviendra son futur patron à la clinique chirurgicale de St-Pierre. Il termine ses études de médecine en 1887 et reçoit le Prix SEUTIN de la Société Royale des Sciences médicales et naturelles de Bruxelles. Il veut donner plus d’importance au laboratoire dans l’approche chirurgicale. Après avoir visité Carl LUDWIG et son laboratoire de chimie biologique à Leipzig, Jaroslav HLAVA en pathologie à Prague et Hans KUNDRAT en anatomie pathologique à Vienne, il revient à Bruxelles pour fonder le premier laboratoire belge de recherche clinique à l’hôpital St-Jean. En 1890, sa thèse d’agrégation, commencée chez KUNDRAT, porte sur la tuberculose osseuse.
En 1895, il est nommé chef du service de Chirurgie à l’Hospice de l’Infirmerie, puis en 1900 à St-Jean et succède à son maître THIRIAR à l’hôpital St-Pierre en 1912. Durant cette période, il s’intéresse aux différentes disciplines chirurgicales en réformant et innovant les techniques et procédures et en créant ou modifiant plusieursinstruments. En 1907, il crée la première école belge d’infirmières, dont il confie la direction à Edith CAVELL, et l’annexe au premier Institut chirurgical de Bruxelles qu’il avait fondé précédemment. Ce dernier deviendra plus tard l’Institut médico-chirurgical de la Croix-Rouge. Dès 1903, il est chargé de l’enseignement de la clinique de chirurgie et est nommé professeur de pathologie externe en 1912.
La même année, la guerre des Balkans éclate. Il part pour Constantinople à la tête d’une ambulance qu’il a organisée, composée de médecins, d’infirmières et de brancardiers. Frappé par la désorganisation du Service de Santé turc, il en retire la nécessité de pratiquer les premiers soins aux blessés sur le front des combats et l’importance de l’urgence de l’acte chirurgical. Cette expérience de la chirurgie de guerre acquise à la veille de la 1èreguerre mondiale le porte en première ligne lorsque le conflit se déclenche. Dès le 4 août 1914, la reine Elisabeth lui demande de se charger de l’organisation hospitalière. Il crée une première ambulance de 100 lits au Palais royal, puis un hôpital de 350 lits à Calais et finalement l’Ambulance de l’Océan à La Panne, un hôpital de 1200 lits à moins de 12 km du front. DEPAGE s’entoure de collaborateurs choisis en dehors du cadre militaire, s’opposant ainsi à l’état-major. Il met en pratique de nouvelles techniques de stérilisation comme l’irrigation continue au liquide de CARREL. Il organise la formation des médecins et des infirmières et fait publier les « Annales de l’Ambulance Océan »54. Cet hôpital devient rapidement un centre de référence international. C’est par ses relations outre Atlantique, notamment au sein de la Société Internationale de Chirurgie, qu’il assure le soutien et les ressources de l’Ambulance de l’Océan.
A la fin du conflit, il est fêté à Bruxelles à l’occasion de la réunion célébrant le 25e anniversaire de la Société Belge de Chirurgie, dont il est élu président pour la deuxième fois. Il est également invité à présider le XXIVe congrès de la Société Française de Chirurgie. Dès 189355, il participe avec Elie LAMBOTTE et Jules LORTHIOIR à la fondation de la Société Belge de Chirurgie (SBC), dont il est secrétaire de1893 à 1900, vice-président en 1903 et 1904 et président en 1905 et 1919. En 1902, il participe avec Robert DANIS et Léopold MAYER à la création de la Société Internationale de Chirurgie, dont il devient secrétaire généralde 1904 à 1911 et président de 1911 à 1914. Il organise à Bruxelles les trois premiers congrès de cette Société en 1905, 1908 et 1911 et est président du IVe congrès à New-York en 1914. En 1907, il est élu membre de l’Académie Royale de Belgique et, en 1923, membre associé étranger de l’Académie Nationale de Médecine de France. Il est également fondateur de la revue « L’année chirurgicale ».
Président de la Croix-Rouge de Belgique, il fonde la Croix-Rouge du Congo et la Croix-Rouge de la Jeunesse. Il consacre la fin de sa carrière à des projets de réforme sanitaire et de gestion hospitalière. En 1919, il projette la construction d’un hôpital administré et géré par l’Université Libre de Bruxelles, qui doit compléter la Faculté de Médecine. Malgré le soutien de la Fondation Rockefeller, ce projet prémonitoire n’aboutit pas. Sénateur en 1920, ildécède prématurément à 63 ans à La Haye, le 10 juin 1925, à la suite d’une intervention chirurgicale.
En matière d’ostéosynthèse, il met au point le boulonnage des os. Les boulons qu’il a imaginés ont un diamètre. d’un à deux millimètres et sont de longueur variable. A l’une de leurs extrémités se trouve une tête arrondie en crochet ou en agrafe. L’autre extrémité se termine par un fil métallique qui traversera le trou de forage réalisé préalablement et qui servira ensuite à enfiler l’écrou pour l’amener sur le boulon afin de pouvoir le serrer.
Elie LAMBOTTE (1856-1912), le chirurgien formateur de son frère
Elie LAMBOTTE est né à Namur en 1856. Frère d’Albin LAMBOTTE, dont nous avons déjà parlé et que nous évoquerons plus amplement encore par la suite, il était chef de service de chirurgie à l’Hôpital de Schaerbeek. Il estprobablement l’un des premiers chirurgiens au monde à avoir traité les fractures obliques du tibia par la réduction à foyer ouvert et fixation56 par vis, à la fin du XIXe siècle57. Comme souvent, la question de la primauté est malaisée à trancher mais d’après BARTONICEK58, ce fut en 1890, qu’ARBUTHNOT LANE, un des grands personnages de l’orthopédie moderne, commença à implanter des vis pour fixer des fractures59. Les premières publications du célèbre orthopédiste anglais sur les vis semblent en tout cas dater de 189360. Selon Philippe VICHARD et GAGNEUX61, Elie LAMBOTTE aurait déjà pratiqué l’ostéosynthèse à l’aide d’une plaque dès 1891, c’est-à-dire avant William ARBUTHNOT LANE, encore une fois, qui n’aurait commencé à publier sur les plaques qu’en 189462. Quoi qu’il en soit, malgré de bons résultats de ses techniques innovantes, Elie LAMBOTTE rencontre d’abord une farouche résistance parmi ses confrères. Ce sera en quelque sorte son jeune frère Albin qui développera très largement et fera triompher ses idées
Le Docteur Elie LAMBOTTE fait également preuve d’inventivité dans d’autres domaines de l’orthopédie, puisqu’il imagine des lits orthopédiques et des matelas anti-escarres pour lesquels il dépose des brevets. Elie LAMBOTTE a la réputation d’être un excellent clinicien et un opérateur audacieux et très efficace. Il est également un précurseur en chirurgie de l’estomac et de la vésicule biliaire. Il publie plusieurs monographies, notamment sur le traitement chirurgical des affections gastriques63. Il devient également conseiller communal dans sa commune, à Schaerbeek, en 1895. C’est pour lui l’occasion de susciter la création d’un nouveau service communal d’hygiène publique. Il souhaite en effet s’impliquer dans la gestion de la santé publique par sa localité, participant sans nul doute de cette manière au grand courant hygiéniste qui parcourt l’organisation des villes tout au long du XIXe siècle64. Il disparaît prématurément en 1912, à l’âge de 56 ans. Une rue de Schaerbeek rappelle sa mémoire.
6. LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE
Au début du XXe siècle, la chirurgie de guerre et la traumatologie étaient loin d’être prêtes à faire face auxnouveaux besoins qu’allait engendrer la catastrophe planétaire de 1914-1918. On peut lire dans le discoursprésidentiel du congrès de chirurgie de 1912 prononcé par Edmond DELORME65, chirurgien militaire et professeur au Val-de-Grâce, que « les blessures des parties molles par les balles sont peu importantes. Certains orifices sont très petits et on comprend que des lésions généralement aussi minimes guérissent vite ». Selon Jacques de FOURMESTRAUX66, auteur d’une
« Histoire de la chirurgie française », DELORME affirmait avec autorité dans le même discours, que « les coups de feu dits explosifs, dans lesquels les désordres anatomiques sont portés à un degré considérable, traumatismesdans lesquels on considérait l’amputation comme fréquemment indiquée, guérissent (en fait) facilement ainsi que l’a montré l’expérience ». Cette vision optimiste, exprimée par un théoricien deux ans avant le début du conflit armé, s’est avérée complètement erronée.
La réalité de la guerre fut tout autre. Comme l’écrivait Georges DEBAISIEUX dans le recueil des travaux de l’Ambulance « L’Océan » de La Panne67, la proximité de l’ennemi favorisait les coups de feu à courte distance et les dégâts tissulaires s’avéraient dès lors bien plus considérables que dans les conflits précédents. Et quand la balle rencontrait un os sur son parcours, elle en provoquait l’éclatement sous son impulsion. Les conditions de combat, qui se déroulaient fréquemment dans la boue, étaient propices à l’infection des blessures. Et cela allait sans compter qu’avec l’artillerie, les plaies étaient devenues nettement plus graves. Elles étaient infectées et renfermaient souvent des corps étrangers (éclats d’obus, projectiles divers, morceaux de vêtements,…) qui, non seulement, entraînaient par eux-mêmes un surcroît de risque infectieux mais encore, empêchaient la cicatrisation. La gangrène gazeuse, au cours ces années sombres, fut dévastatrice68. Les principales préoccupations, dans ces conditions, étaient la prévention de l’infection des lésions et le soulagement des douleurs du blessé. Il fallut remettre au rang des priorités les impératifs de débridement, d’extraction des corps étrangers, d’antisepsie et d’asepsie.
Ce conflit moderne allait donc amener les chirurgiens à faire face à un afflux massif de blessés, dont beaucoup étaient polytraumatisés, avec des blessures d’un type nouveau. D’abord débordé et manquant de presque tout le matériel nécessaire, avec un personnel insuffisant et mal formé hormis les médecins, le système de santé de l’armée belge a dû s’organiser69. Dans les premiers temps, la prise en charge des blessés consistait à les évacuer loin du front pour les soigner à l’arrière. Seuls des premiers soins sommaires leur étaient prodigués sur le lieu de leur traumatisme. Les pertes étaient relativement élevées. Des postes chirurgicaux situés près du front ont été mis en place. Grâce à cela, le débridement des plaies et l’immobilisation des fractures étaient devenus possibles peu de temps après la survenue du traumatisme, ce qui améliorait les chances de survie des blessés.
« Le 30 octobre 1914, le Roi confie à Antoine DEPAGE la mission de créer à La Panne un hôpital de la Croix-Rouge. En six semaines, l’hôtel de l‘Océan est transformé en hôpital. Antoine DEPAGE a 52 ans. Il est chef de service de chirurgie à l’hôpital Saint-Pierre à Bruxelles et professeur à l’Université libre de Bruxelles. Il s’est battu pour la modernisation des hôpitaux publics bruxellois et a créé, avec son épouse Marie et avec Edith CAVELL, la première école d’nfirmières diplômées en Belgique. Le couple royal et les époux DEPAGE se connaissent et se fréquentent de longue date. En 1912, Antoine DEPAGE avait dirigé un hôpital de la Croix-Rouge àConstantinople, une « ambulance », ainsi que l’on disait pour les hôpitaux destinés aux victimes de guerre. Il sait que la guerre moderne condamne l’ancienne règle d’établir les hôpitaux loin à l’arrière et qu’il faut de nouveaux principes, de nouvelles méthodes, de nouveaux outils pour combattre des blessures qu’elle inflige. L’Hôtel de l’Océan, à front de mer, est disponible. Grâce à l’entourage de la reine, on en dispose rapidement. Une unité militaire au repos le transforme. Quelques femmes d’officiers et de médecins l’aménagent. L’équipement technique et médical vient de Londres. L’Ambulance de l’Océan entre en service le 21 décembre »70.
« En 1915, l’Ambulance de l’Océan compte plus de 1 000 lits d’hospitalisation. Elle est dotée d’une organisation très moderne, appuyée sur une logistique remarquable ».71 « La Panne est située à 18 km du front. Trop loin encore pour les blessés les plus sévères, frappés d’hémorragies graves, de plaies de l’abdomen et de « shock ».Ils sont conduits, à travers le lacis des tranchées, puis par de mauvais chemins ou par canot à moteur, vers trois postes chirurgicaux avancés. Le poste de Oostekerke est à 3 km du front. Cinq camions sont reliés par des tentes. Ils abritent une salle d’opération, une pharmacie et un stérilisateur pour les instruments chirurgicaux, unelingerie et des couchettes destinées au personnel médical ».72
Il n’est sans doute pas exagéré de considérer que l’Ambulance « L’Océan » de la Panne a fait figure de creusot des progrès de la chirurgie de guerre. La lutte contre l’nfection par l’antisepsie (avec Alexis CARREL), le développement de la radiologie (par Etienne HENRARD et même Marie CURIE, qui y est passée) et bien d’autres aspects encore, justifient, nous semble-t-il, la valeur exemplative que nous accordons à cette institution.
Les conditions de pratique de cette chirurgie de guerre ne lui ont pas permis de bénéficier des très récents développements de l’ostéosynthèse apportés en particulier par Albin LAMBOTTE. Celui- ci écrit dans la préface de la réédition de 1913 de son ouvrage « l’asepsie est la condition sine qua non de l’intervention sanglante dans les fractures »73. Parmi les « inventions » de LAMBOTTE, c’est le fixateur externe qui s’avèrera l’outil le plus performant pour traiter les fractures de guerre. Si la première application du fixateur externe remonte à 1902, il ne s’imposera réellement dans le traitement des fractures de guerre que lors de la seconde guerre mondiale et surtout des conflits ultérieurs.
Dans l’article de DEBAISIEUX cité plus haut, l’auteur détaille longuement l’examen du blessé et l’opération de débridement, puis aborde de nombreuses considérations sur la physiopathologie de l’infection, sur l’asepsie et l’antisepsie mais ne souffle mot des problèmes osseux. Un service de l’hôpital « L’Océan » (service n° V) est pourtant dédié à la prise en charge des fractures des membres74. Il est dirigé par le Docteur Joseph VANDEVELDE, assisté par un adjoint dont le nom n’est pas connu. Après le retour à la paix Maurice CHARBONNEL75, chirurgien de première ligne, a écrit qu’il n’avait guère pratiqué d’ostéosynthèses au cours de ces années de guerre.
La première guerre mondiale a entraîné beaucoup de traumatismes maxillo-faciaux : les « gueules cassées ». Le Docteur Oswald RUBBRECHT a publié dans le recueil des travaux de l’Ambulance L’Océan un article sur « la réduction et la contention mécaniques des fractures des maxillaires76 ». La contention des fractures de lamandibule peut se faire par ligature dentaire.
Les grands blessés, invalides de guerre ont continué à être soignés après la guerre. La chirurgie réparatrice destéguments et des formes77, la chirurgie secondaire des fractures et des pseudarthroses ainsi que l’appareillage des amputés ont fait de considérables progrès suite à cette expérience.
Des techniques de greffe osseuse ont été décrites par le Docteur Fernand NEUMAN dans son article. du recueil des travaux de LaPanne78. Le Docteur NEUMAN (1879-1958) deviendra dans l’entre-deux-guerres l’un des présidents de la Société Belge d’Orthopédie (1932). Il prend soin d’écrire dans son article que les greffes ostéo-périostiques ne représentent pas une technique totalement nouvelle au moment de la première guerre mondiale.
Louis DELREZ, futur professeur de chirurgie à l’Université de Liège, a contribué au recueil des travaux de l’Ambulance L’Océan79. Lui aussi insiste sur l’importance de l’asepsie et de l’antisepsie, de l’intervention précoce et. du débridement des plaies. Il aborde le problème des lésions articulaires.
Autre aspect de la prise en charge des mutilés de guerre, la revalidation des militaires blessés fut confiée aux départements de kinésithérapie et d’orthopédie de l’Hôpital L’Océan. Ce dernier avait mis sur pied un atelier de fabrication de prothèses. La première déflagration mondiale a forcé le développement des appareillages pour amputés. Un certain nombre d’orthopédistes furent par la suite actifs dans ce domaine.
Sur le plan médical comme dans bien d’autres domaines, la sortie de guerre ne fut pas aisée non plus. Mais nos compatriotes ont su se faire une place très honorable. On peut lire dans « L’Histoire de la Société française d’Orthopédie »80 : « La victoire des Alliés, le rattachement de l’Alsace- Lorraine à la France furent à l’origine de nombreuses et enthousiastes manifestations en France. Le bureau de la Société, au lieu de se réunir à Paris, a décidé d’organiser le congrès d’orthopédie en 1921 à Strasbourg. » « Le Président de ce congrès fut Jules BOECKEL, de Strasbourg, qui avait toujours maintenu l’esprit français dans son service. Au congrès de Strasbourg, vingt-trois membres ont été élus, dont trois Belges ». Selon l’auteur de l’Histoire de la Société française d’Orthopédie, cela montre bien la volonté d’extension de la Société aux pays étrangers. Mais cet épisode montre aussi la difficulté d’internationalisation au début du XXe siècle et le coup d’arrêt que lui a porté la première guerre mondiale : les savants allemands ont été exclus des débats scientifiques pendant plusieurs années81.
7. LA SECONDE GUERRE MONDIALE
La Belgique obtint de l’Allemagne nazie une réaffirmation de sa neutralité en 1937. Durant cette période qui aprécédé la guerre de 1940, l’armée belge fut totalement réorganisée pour ne plus constituer qu’une armée de défense et des travaux de modernisation et de fortification furent entrepris, particulièrement en province de Liège à la frontière avec l’Allemagne. Lors de l’invasion de la Pologne en 1939, laBelgique déclara néanmoins une mobilisation générale. Ce fut la période du « pied de paix renforcé » avecinterdiction pour les militaires de quitter le territoire.
Pendant la « drôle de guerre » en 1939, la Société a néanmoins travaillé sur les blessures de guerre avec une communication de Professeur Louis DELREZ de Liège et sur l’organisation du traitement des blessures de guerre du squelette à l’armée belge, exposé donné à sa tribune par René ROMBOUTS, médecin militaire alors mobilisé et il y a également eu des travaux sur les amputations. Lors de l’Assemblée Générale du 18 novembre 1939, vu les circonstances et le peu de membres présents, le Président Adolphe MAFFEI estima qu’il ne fallait pas prendrede décision importante et proposa de ne pas modifier la composition du Bureau (au moins pour un an). Ladernière réunion avant la guerre s’est tenue le 20 avril 1940.
Quelques jours avant l’invasion, à la séance du 27 avril 194082, Albin LAMBOTTE a présenté à l’Académie Royale Belge de Médecine une communication intitulée : « Quelques considérations sur la chirurgie dite de guerre ». Cette communication sera discutée après la campagne des 18 jours, le 21 décembre 1940.
Malgré sa neutralité, la Belgique fut plongée dans la guerre dès l’invasion de son territoire par les troupes allemandes, le 10 mai 1940. L’invasion débutera par l’attaque et la prise du fort d’Eben- Emael, qui sera à l’originede la campagne des 18 jours. Les forces armées belges furent rapidement repoussées pour ne plus occuper qu’une petite partie du territoire au nord-ouest. Pendant cette campagne, le service de santé a déployé des « ambulances chirurgicales légères » où officiaient des chirurgiens, en particulier à proximité d’Aarschot où se sontretrouvés des chirurgiens d’active83 et des médecins du cadre de réserve dont J. Eugène PICARD84 pathologiste à l’Institut du cancer de Louvain. Ces structures ont travaillé d’arrache-pied pendant une brève période et ont ensuite participé au mouvement de recul des troupes. Le roi Léopold III a annoncé la capitulation de la Belgique le 28 mai 1940.
Ce fut le repli vers le sud de la France : en quelques semaines, des millions de personnes s’enfuient de Belgique, des régions du Nord puis de l’Île-de-France et du Centre vers le Sud de la France, emportant avec elles de maigres bagages. Ce fait eut lieu dès l’invasion de la Belgique en mai 1940 mais a été précédé, dès l’automne 1939, de l’évacuation de civils de l’Est de la France. Les premiers retours des habitants eurent lieu dès début juin 1940, le reflux de ceux ayant choisi de revenir croisant la deuxième vague de fuyards.
Après l’invasion, les Bureaux des six Sociétés Belges des Sciences Chirurgicales se sont réunis en juillet 1940 à la Maison des Médecins. Devant les mesures de contrôle et les vexations que réservait l’autorité occupante, ils ont décidé à l’unanimité, que les réunions scientifiques devaient être suspendues. Et ce fut le black-out complet durant cinq années. La première réunion d’après- guerre s’est tenue le 30 juin 1945 à la Maison des Médecins, retrouvée avec joie.
Les structures hospitalières étaient à nouveau fonctionnelles dès juillet 1940, en particulier l’hôpital militaire d’Anvers.
Pendant la guerre, plusieurs membres de la Société ont eu un comportement héroïque, en particulier Adolphe MAFFEI qui est mort en camp de concentration, Joseph CORNET et René ROMBOUTS qui sont passés à la Prison de Saint-Gilles avant d’être déportés comme prisonniers politiques. Georges HENDRIX fut médecin debataillon. Georges PAUWELS, chirurgien militaire diplômé de l’UCL en 1934 s’évade au Congo Belge, rejoint la force publique et en 1943, il fait partie du corpsexpéditionnaire belge au Moyen-Orient. Edouard VANDER ELST85 évoque la création d’un réseau de résistance à Anvers. Marcel VAN DER GHINST86 fit de la résistance armée : membre de l’escadron BRUMAGNE de l’armée secrète, il participa à la libération d’Anvers. Paul LORTHIOIR87 qui avait fait la première guerre dans l’artillerie reprit du service comme officier d’artillerie. Il a été fait prisonnier à Ypres. Libéré en 1942 il fut intégré dans le groupe de renseignement COMETE et a participé à l’impression du fameux « Soir volé ».
Une exposition du Cercle Polytechnique de l’ULB consacre un panneau à la vie de l’Université Libre de Bruxellespendant la deuxième guerre mondiale88. On y apprend qu’après la défaite de 1940, l’Université ferme provisoirement. Mais les Allemands réagissent rapidement et leur administration militaire, la « militärverwaltung »,met sur pied un projet de restructuration destiné à relancer l’activité de l’ULB et à l’inscrire dans la ligne de l’« Ordre Nouveau », notamment en nommant des professeurs qui lui sont favorables et en écartant les juifs et les éléments qui lui sont hostiles. Elle impose aussi la présence d’un Commissaire allemand. En réaction, le conseild’administration suspend définitivement les cours le 25 novembre. Le Commissaire IPSEN, alors en charge, appelle les enseignants à reprendre leurs activités. Mais quelques-uns seulement (moins de vingt) répondent à cet appel. Il y a des incarcérations et nombre d’étudiants se redirigent vers les universités de Liège et de Louvain. En 1942, des cours clandestins sont organisés dans des athénées de la Ville. Lorsque les Allemands s’en rendent compte,ils organisent la répression, avec déportation ou menace de déportation, ce qui complique nettement l’organisation des cours. Dès la libération de Bruxelles, le 3 septembre 1944, les bâtiments de l’université, uneséance solennelle de rentrée est organisée en novembre et les cours reprennent normalement, alors que la guerren’est pas encore terminée.
Du côté de l’Université de Louvain89, le Recteur, Mgr Honoré VAN WAYENBERGH, a pu regagner le siège de son Université le 19 mai 1940. Il enjoignit le corps académique de reprendre l’enseig- nement et de refuser toutecollaboration avec l’ennemi. Une vingtaine d’enseignants furent interdits d’activité par l’occupant. La rentrée de l’année académique 1940-1941 put avoir lieu le 12 novembre. Comme l’ULB avait été fermée, le Recteur n’hésita pas à accueillir les étudiants bruxellois malgré les difficultés du moment. Refusant de collaborer avec l’ennemi, le Recteur fut arrêté le 5 juin 1943 et condamné à 18 mois de prison, qui furent commués en résidence forcée. Le 12mai 1944, la ville de Louvain eut à subir un bombardement dévastateur.
La Belgique était dotée d’hôpitaux modernes90 dont plusieurs avaient été construits pendant l’entre-deux guerres. Citons l’Hôpital français Reine Elisabeth à Berchem-Sainte-Agathe, l’Hôpital Saint-Pierre à Bruxelles, l’Institut HEGER-BORDET et l’Hôpital Universitaire de Gand ainsi que de nombreux sanatoria, le plus souvent situés dans les campagnes entourant les grandes villes. Les hôpitaux militaires étaient nombreux.
En Belgique, nous avons peu d’informations sur les centres héliomarins, en particulier ceux qui sont situés à la côte (un centre héliomarin ou CHM est un établissement médical de cure, situé à proximité de la mer ; on y utilise simultanément l’action thérapeutique des rayons du soleil et de l’air marin). Les premiers centres furent créés à lafin du XIXe siècle pour soigner les patients atteints de tuberculose. Aujourd’hui, les centres héliomarins voient leur activité se diversifier, notamment avec la rééducation fonctionnelle, qui s’adresse à un public principalementvictime d’accidents de la route, d’accidents domestiques et de manière générale aux personnes ayant bénéficié d’une ostéosynthèse91. La lecture des Acta nous a donné quelques informations sur le Coq : la Fondation Belge pour le traitement des affections de l’appareil locomoteur de la Clinique maritime de Coq- sur-Mer est associée à la Clinique de Neerijssche dont le Chirurgien en chef est Jean DELCHEF. Plus tard, la direction de ce centre seraassurée par Boris BLANKOFF et ensuite Fernand PARISEL. Nous n’avons pas trouvé d’informations sur Oostduinkerke aan zee ni sur Oostende.
En ce qui concerne l’Ordre des Médecins92,93,94,95,96, il avait été créé par une loi de 1938. Eggert
REEDER, chef de la « militärverwaltung », demande la mise en place de cet Ordre des médecins.
J.F. VOSSEN s’y oppose et est destitué par les allemands. Ceux-ci nomment G. ROMSEE qui crée un ordre ennovembre 1941. La Fédération Médicale Belge s’oppose à cet « Ordre Bis », considéré d’emblée comme suspect. En 1942 une ordonnance de la « militärverwaltung » interdit aux Juifs d’exercer la profession médicale. L’ordre deguerre était dirigé par les Docteurs Fr. VAN HOOF et
M. DOSSIN. Ils ont été lourdement condamnés en 1947 pour collaboration. Cet ordre de guerre a été supprimédès mai 1944 par un arrêté-loi pris à Londres par le gouvernement en exil. L’ordre ne sera finalement établi sans filiation avec cet ordre de guerre que par une loi de 1947 et finalement organisé par l’Arrêté Royal n° 79 relatif à l’Ordre des Médecins qui a été sanctionné le 10 novembre 1967.
Nous avons relativement peu d’informations sur la façon dont l’orthopédie et la traumatologie ont été pratiquées en Belgique pendant la guerre 40-45.
La discussion qui s’est tenue à l’Académie de Médecine le 21 décembre 1940 et qui concerne la communication de LAMBOTTE présentée avant le début du conflit nous donne une idée des préoccupations de l’époque.
Jules BORDET, prix Nobel en 1919, proclame, face aux préoccupations d’Albin LAMBOTTE :
« Les bactériologistes sont un peu étonnés quand ils entendent des chirurgiens exprimer l’opinion que tous les tissus contiennent des microbes, même les tissus sains. En réalité, des fragments d’organes internes des animaux d’expérience peuvent être immergés dans les milieux de culture sans qu’on observe le développement d’aucun germe. M. LAMBOTTE a rappelé des expériences déjà anciennes du Docteur PREOBAJENSKY, montrant que la simple application sur une plaie d’un pansement sec capable d’absorber la sérosité, peut prévenir l’infection grâce à l’évaporation rapide qui s’oppose au développement microbien. Il est bien certain que la dessiccation empêche le développement microbien, mais il est difficile, quand on institue des expériences de ce genre, de réaliser tous les témoins appropriés. La réceptivité d’une plaie dépend de facteurs nombreux, notamment de la nature du virus, et aussi du temps qui s’est écoulé depuis que la plaie a été produite. Une plaie toute récente se laisse infecter plus aisément qu’une plaie datant déjà d’un certain temps ; dans celle-ci, le processus inflammatoire qui s’installe bientôt contrarie la pénétration des germes. D’autre part, s’il est souvent légitime de prôner l’asepsie plutôt que l’antisepsie, il ne faut pas méconnaître que l’emploi de compresses simplement stérilisés mais qui ne sont imprégnées d’aucun antiseptique est parfois dangereux. ../ Il importe que le pansement contienne une substance entravant le développement microbien. » Les théories de LISTER et de PASTEUR restaient en compétition.
Fritz DE BEULE, professeur de chirurgie à l’Université de Gand intervient et commente l’exposé théorique de LAMBOTTE avec l’expérience de la guerre des 18 jours : « Je ne partage pas entièrement les conceptions de mon excellent Collègue et ami LAMBOTTE au sujet du traitement des plaies de guerre. En opposition avec lui, je suis un partisan convaincu de l’épluchage. Dans nos ambulances de la Croix-Rouge à Gand où, au cours des mois de mai et juin, nous avons eu à soigner plus de deux mille blessés graves, nous en avons fait un très large usage, et nous n’avons eu qu’à nous en louer. Il semble d’ailleurs qu’a priori l’excision de tous les tissus contus, dilacérés, privés de circulation et, par le fait même, voués à la nécrose, doit être une mesure excellente. On. débarrasse ainsi la plaie d’une masse de matière morte qui constitue un milieu de culture idéal pour les germes pathogènes. Le succès de l’épluchage est toutefois subordonné à deux conditions capitales : primo, qu’il soit aussi radical que possible, l’excision devant être poussée jusque dans les tissus sains saignant à vif ; secundo, qu’on ne se laisse, sous aucun prétexte, tenter à fermer la plaie. Nous nous abstenons systématiquement de toute suture, même de points angulaires, et nous maintenons la brèche largement béante en la tamponnant à la gaze hydrophile. Ce tamponnement, comme le dit très bien M. LAMBOTTE, assure par aspiration le meilleur des drainages. Il est laissé en place pendant plusieurs jours, mais le pansement absorbant antérieur est par contre renouvelé fréquemment. Lorsque, au bout de quinze jours ou trois semaines, la plaie est bien assainie et franchement bourgeonnante, nous la fermons par avivement et suture, en laissant un drain de sûreté central ou deux drains angulaires. Il va sans dire que l’épluchage doit être aussi précoce que possible. Les blessés y sont soumis immédiatement après leur entrée à l’ambulance endéans les vingt-quatre premières heures qui suivent le traumatisme. Seuls les grands choqués échappent à la règle générale. Dans les plaies largement infectées, suppurant abondamment et qui souvent sont irrégulières et anfractueuses, nous recourons aussi. régulièrement, à l’encontre de M. LAMBOTTE, à l’irrigation continue. Comme notre Collègue, nous sommes toutefois très sceptiques au sujet de l’efficacité de l’action biologique des solutions antiseptiques employées. A notre sens, c’est surtout par leur action mécanique de détersion, par l’élimination du pus et des parcelles de tissu mortifié, que l’irrigation est utile. Notre conviction à cet égard est telle que nous avons remplacé les solutions antiseptiques par de l’eau stérile chaude additionnée d’eau oxygénée au tiers. Le moussage produit un effet détersif excellent et nettoie à fond jusqu’aux moindres recoins de la plaie. Nous nous sommes aussi très bien trouvés de l’administration systématique à tous nos blessés de sulfanilamides. Même à titre préventif, tous prenaient régulièrement six comprimés d’ASTREPTINE par jour et, dans les cas graves, la dose était même forcée. »
Si il y a de vives discussions concernant la façon de prévenir les infections, il y a unanimité sur l’intérêt du fixateur externe dans le traitement des fractures ouvertes : « Lorsque maintenant notre ami LAMBOTTE affirme que le meilleur traitement des fractures ouvertes et esquilleuses consiste dans l’ostéosynthèse immédiate, le foyer restant ouvert, par son appareil à fixateur externe, nous applaudissons des deux mains. Entre les mains de qui sait s’en servir cet instrument fait vraiment merveille, et nous avons beaucoup regretté n’avoir eu que quatre appareils à notre disposition. Si nous en avions eu trente ou quarante, ils nous eussent tous servi. Excellent pourl’appareillage des fractures du tibia et des os du membre supérieur, il l’est moins toutefois pour celles du fémur qui, à notre avis, se trouvent le mieux de l’extension continue à la broche de KIRCHNER. »
LAMBOTTE répond en insistant sur le fait qu’il a été déçu par la sérothérapie et même par les vaccins .
L’Académie de Médecine, par la voix de Fritz DE BEULE validait ainsi, en décembre 1940, le traitement des fractures ouvertes par fixateur externe, en particulier en cas de blessure de guerre. La première application dufixateur externe par Albin LAMBOTTE avait été réalisée le 24 avril 1902 à l’Hôpital du Stuyvenberg à Anvers97.
Josep Anthony TRUETA chirurgien à Barcelone (1899-1977), avant de rejoindre Oxford où il fut nommé professeur en 1949, avait soigné les blessés de la guerre d’Espagne. En 1939, il a publié à Londres un livre devenu un classique : « Treatment of war wounds and fractures »98. Dans cet ouvrage, le traitement par fixateur externe n’est pas envisagé : l’immobilisation des fractures est faite par plâtre fenêtré, traction ou attelle de Thomas.
A la fin de la guerre de 14-18, les chirurgiens allemands avaient préconisé de laisser les plaies de guerre ouvertes et exposées à l’air sans pansement99.
En 1940, la prévention de l’infection des blessures et fractures de guerre continue à faire l’objet de controverses, en particulier quant à l’étendue de l’épluchage et l’opportunité de la couverture. TRUETA recommande de recouvrir les plaies par de la gaze stérile, parfois avec un drain lamelle. L’administration d’antitoxine tétanique est la règle mais TRUETA insiste avant tout sur l’effet bénéfique d’une stricte immobilisation. Le traitement des plaies de guerre n’est certes pas bien codifié.
Epluchage et immobilisation stricte des fractures ouvertes, administration de la prévention antitétanique et soins locaux attentifs restent la règle, avec parfois utilisation de sulfamidés.
Un progrès essentiel arrive un peu plus tard, avec la première production en série de pénicilline vers 1942 pour l’armée américaine. La pénicilline est un antibiotique issu d’une moisissure, découvert par le britannique Alexander FLEMING (1881-1955) en 1929 mais seulement utilisé pour les premières fois une décennie après. En effet, la pénicilline étant difficile à produire en grande quantité, la découverte de FLEMING est restée peu connue pendant des années.
Les traitements antituberculeux ont été découverts à partir de 1939, la sulfone-mère d’abord et puis, après desessais avec différents antibiotiques, la streptomycine qui a été mise à la disposition des médecins à partir de 1946.
Avec la fin de la guerre, une nouvelle ère de la médecine s’ouvre.
8. LES GÉANTS DE L’ORTHOPÉDIE BELGE
Albin LAMBOTTE (1866-1955) et l’ostéosynthèse
ALBIN LAMBOTTE est né à Saint-Josse-ten-Noode le 3 juillet 1866 et décédé à Anvers le 1er août 1955. Il était d’une famille de vieille souche bourgeoise où les spéculations philosophiques, l’étude des sciences et des arts aussi bien que la magistrature étaient très à l’honneur100. Son père Henri fut professeur d’anatomiecomparée, de biologie et de chimie à l’Université de Bruxelles. Benjamin d’une famille de sept enfants, il n’avait que sept ans quand son père mourutaccidentellement. Esprit très éveillé et très curieux, admirablement doué, il entreprit des études médicales à l’Université libre de Bruxelles en 1885. Il les termina en 1891, avec grande distinction. Vers la fin de sa formation (de 1898 à 1890), il fut interne au Lazaret de Schaerbeek, dans le service de chirurgie dirigé par son frère Elie, qui exerça sur Albin une très grande influence. Puis il fut interne des Hôpitaux civils d’Anvers (1890 à 1892), poste qu’il occupa donc encore immédiatement après son diplôme.
Dès sa première année de vie professionnelle, une épidémie de choléra éclate et LAMBOTTE se met au service des autorités. Il pratique des entérostomies suivies de grands lavages intestinaux. Son dévouement pendant cette épidémie de choléra de 1892 lui valut l’année suivante d’être décoré d’une Médaille civique de 1ère classe101. En 1893, c’est une épidémie de diphtérie qui surgit et il sauve de nombreuses vies grâce à des trachéotomies.Puis il devient chirurgien au pavillon des varioleux. En 1894, il obtient le poste de chirurgien-adjoint des hôpitaux civils d’Anvers dans le service deLéon DESGUIN à l’Hôpital Sainte-Elisabeth, fonction qu’il exerça jusqu’en 1897102. En 1894, il fut le premier à réussir la résection totale d’un estomac en Belgique103.
De 1900 à 1910, il est chef de service à l’Hôpital Stuyvenberg. Il y pratique la chirurgie abdominale et la chirurgie médullaire et crânienne que lui confiait en particulier le célèbre neurologue Arthur VAN GEHUCHTEN. Sa réputation avait dépassé les frontières et en 1902, il est invité à donner une démonstration opératoire àHeidelberg104. En 1905, il est appelé à la vice-présidence de la Société belge de Chirurgie présidée par DEPAGE, auquel il succède en 1906105.
C’est pendant cette période, de 1900 à 1910, qu’Albin LAMBOTTE entreprend le traitement opératoire des fractures106. En 1904, il propose l’« ostéosynthèse » de certaines fractures. Sa définition de 1908 reste toujours d’actualité : « On entend par ostéosynthèse la contention artificielle des fragments osseux des fractures, par des appareils spéciaux agissant directement sur les os, mis à nu ou non, et destinés à les fixer définitivement dans leur position quo ante ».107
Son invention la plus importante est le fixateur externe dont une première version fut expérimentée en 1902. L’évolution de cet appareil, élémentaire initialement, a abouti à un tuteur reliant des vis placées dans l’os, à une tige par l’intermédiaire de pièce de raccordement mobilisable108.
En abordant la chirurgie des fractures, il s’attaquait à un véritable tabou. Ses principes étaient simples et très stricts :asepsie rigoureuse, réduction anatomique parfaite et immobilisation des fractures. Il insistait sur la douceur dans le geste opératoire. Le travail devait se faire à bout d’instrument : c’était le concept de « non touch technic », ainsi désigné par une expression d’origine anglo-saxonne, mais que LAMBOTTE appliquait déjà depuis longtemps lorsque le vocable se répandit sur le continent. Il soutenait aussi l’idée très novatrice de la mobilisation précoce du patient après une intervention chirurgicale, dans le but d’éviter la fonte musculaire. La radiographie avait à peine quelques années d’existence109 et il en comprit rapidement l’intérêt. L’imagerie osseuse allait permettre de mieux poser les indications d’une intervention et d’en suivre les résultats. Mais devant l’importance des nouveaux moyens diagnostiques et thérapeutiques, il soulignait aussi la responsabilité morale du chirurgien, qui se devait d’être rigoureux dans ses choix et dans ses actes.
A force de persévérance, il finit par faire triompher ses idées. C’est en 1907 qu’il publia « L’intervention opératoire dans les fractures récentes et anciennes envisagée particulièrement au point de vue de l’ostéosynthèse »110. On y trouve de nombreuses observations cliniques, avec contrôles radiographiques et monitoring précis des étapes de la guérison. Sur une série de 187 patients traités avec succès, il n’eut à déplorerque deux décès. Albert HUSTIN111 lui dira bien plus tard, lors de son jubilé professionnel : « Votre traité reste toujours le Livre où les chirurgiens vont puiser, comme à la source même des premiers principes, les notions qui les guideront dans leurs opérations sur les os. » C’était en 1935112. En 1908, il avait présenté les résultats d’une série de 35 opérations pour fracture de cuisse. Tous les patients étaient entièrement guéris. La reconnaissance arriva enfin en 1911, au Congrès Français de Chirurgie, grâce au soutien de grands noms comme ceux de Théodore TUFFIER113 (France) et de William ARBUTHNOT LANE114 (Angleterre). Ses concepts l’ont finalement conduit à lacélébrité mondiale. Il fut invité à faire des démonstrations et à donner des conférences dans de nombreux pays. C’est ainsi, par exemple et pour ne citer que quelques invitations venues de France, qu’Albin LAMBOTTE opéra en 1913 à Paris dans le service de TUFFIER, l’année suivante à Lyon dans le service de Léon BERARD et en 1919 devant les membres du Congrès International de Chirurgie. Une anecdote significative illustre bien la renommée qu’il avait alors acquise. Avant la guerre de 14-18, les frères MAYO vinrent à Anvers, à tour de rôle, passer de longues semaines. Débarquant au port, ils ont réservé à LAMBOTTE tout leur temps européen.
En 1913, Albin LAMBOTTE est chirurgien honoraire consultant des hôpitaux d’Anvers et membre correspondantde la société de chirurgie de Paris. A cette époque, il opérait toujours au Stuyvenberg mais également à l’Institut Saint-Camille. Il publie cette année-là son deuxième grand ouvrage, la « Chirurgie opératoire des fractures »115. Puis vint le premier conflit mondial : LAMBOTTE exerça d’abord comme chirurgien de l’Ambulance à Anvers (1914) et chirurgien en chef des invalides pour la Province d’Anvers, pendant la durée de la guerre. Après la grande déflagration planétaire, Albin LAMBOTTE fut l’un des fondateurs de laSociété Belge d’Orthopédie en 1921. Il a présidé la société pendant les trois premières années qui ont suivi sa fondation (1921,1922,1923). Jean VERBRUGGE, à son retour de chez Vittorio PUTTI, rejoint Albin LAMBOTTE comme chirurgien adjoint en 1925, il lui succèdera comme chef de service de chirurgie de l’Hôpital du Stuyvenberg, poste qu’il occupera jusque 1945116.
LAMBOTTE a créé de nombreux instruments ingénieux, simples, façonnés par ses propres mains d’artisan et que les chirurgiens utilisent de manière très courante. Il fabriquait lui-même ses daviers et les utilisait : s’ils étaient bons, il en faisait une copie en bois et la confiait à la firme Collin, le fabricant d’instruments chirurgicaux de Paris, pour lui faire fabriquer les daviers en question. Il modifia aussi une série d’instruments déjà existants, comme les boulons de DEPAGE. N’évoquons ici que les principaux d’entre eux : le fixateur externe, les daviers à mors mobiles ou à trois branches, les rugines, le perforateur, le serre-fil, les prothèses métalliques à ressort, le tracteur et quantité de modèles de plaques et de vis. Ami de la France, il se rendait chaque année au Congrès de Chirurgie de Paris. Lors d’un séjour dans la Ville Lumière, il se précipita vers les établissements Collin, pour expliquer la configuration d’un outil qu’il souhaitait voir confectionner. Sans doute ne parvenait-il pas à se faire comprendre, car il finit par ôter son veston et retrousser ses manches, pour se mettre forger, limer, battre, modeler, ajuster le fer, suscitant une grande admiration chez les ouvriers de l’entreprise117. Il apporta encore des contributions importantes aux procédures opératoires. C’est à lui qu’on doit et notamment le « point en 8 » qui porte son nom, l’hémostase des gros vaisseaux au moyen d’agrafes métalliques, l’utilisation des prothèses en métal pour combler les pertes de substance crânienne, la ligature du pylore dans la gastro-entérostomie, le drainage des grandes cavités tuberculeuses et d’autres manoeuvres encore.
LAMBOTTE aimait accueillir dans son service et former des jeunes confrères118. La première femme chirurgienne en Belgique a été formée dans son service à l’Hôpital du Stuyvenberg. Il s’agit de Madame Jeanne VERSCHUEREN épouse SEL (1880-1961) qui continua à travailler dans cet hôpital tout au long de sa carrière119. LAMBOTTE faisait école par la plume ou par l’exemple, répondant longuement par écrit aux questions qu’on lui posait. Quelques-uns de ses élèves ont eu le privilège de sculpter, forer avec lui120, parfois de l’accompagner au violon. Ils échangeaient avec lui les propos les plus divers, philosophiques, esthétiques, musicaux. Il aimait en effet la musique et jouait du violon. Il a même fabriqué pas moins de 182 violons, dont les experts disaient qu’ils étaient de facture remarquable 121,122. Son nom figure au Dictionnaire Universel des Luthiers de René VANNES, le distingué musicologue français123. Il aimait aussi la lecture et la peinture : non seulement il visitait beaucoup les musées, mais encore lui arrivait-il de rendre le crayon ou le pinceau. La pêche était une de ses distractions favorites. Il fabriqua une série de moulinets d’une extraordinaire légèreté que plus d’un chevalier de la gaule admira sans réserve. Il s’adonnait encore à la sculpture du bois et a laissé de nombreuses statuettes. Il considérait que l’activité manuelle était une forme d’entraînement pour le bon chirurgien et enseignait cette vision à ses disciples. Son ouverture d’esprit était large et couvrait l’histoire, la politique, l’astronomie, les voyages. «Près de lui» a dit VERBRUGGE, «on apprenait à penser».
A la fin de sa longue carrière LAMBOTTE colligea des milliers de radiographies concernant les innombrables opérations osseuses qu’il avait réalisées à partir de 1895 et à en reproduire les schémas au pantographe. Ce fut un véritable travail de Titan, consigné dans quatre volumes. La Société Belge d’Orthopédie a réédité en 1971 et en 1997 un recueil124,125 de cinquante planches sélectionnées dans le premier de ces volumes. Cela représente, en quelque sorte, un condensé des techniques d’ostéosynthèse appliquées par Albin LAMBOTTE au début desa carrière, à une époque où l’ostéosynthèse n’avait pas encore acquis droit de cité en chirurgie. Au début, ilavait pratiqué le vissage direct, le vissage sur prothèse interne (plaque), le vissage sur prothèse externe (fixateur)le cerclage, l’agrafage, l’enclouage, le boulonnage et la suture classique. Vers les années 1907 et 1908, il abandonna presque complètement les quatre dernières techniques, mais pratiqua de plus en plus le vissage sur plaque et le fixateur externe. Il montra comment pratiquer un montage parfait d’une plaque vissée sur une fracture plurifragmentaire. Mais ce n’est vraiment qu’après avoir acquis la certitude que ses techniques et modesde traitement des fractures étaient réellement valables, qu’il osa se risquer à l’ostéotomie des cals vicieux et à leur ostéosynthèse. Dans les années 1940, il revint à certaines techniques qu’il avait complètement abandonnées etl’on vit réapparaître les enclouages et les agrafages, surtout dans les lésions métaphysaires et épiphysaires. Par ailleurs, toujours l’esprit vif à réagir aux conceptions nouvelles, il pratiqua aussi l’enclouage centromédullaire, montrant ainsi que, malgré son âge avancé, il restait ouvert aux innovations126. Inspiré par le courant réformateur en chirurgie de la hanche, il réalisa aussi des arthroplasties avec remodelage de la tête fémorale et paraffinage bismuthé du cotyle. A l’âge de 82 ans, il prépare une révision du livre qu’il avait publié en 1913. Un exemplaire de ce livre annoté à la main en 1948 nous est parvenu : il illustre l’évolution des idées d’Albin LAMBOTTE.
L’homme ne fut pas moins attachant. Son humeur était toujours égale et équilibrée. Il était toute bonté et toute indulgence. Son dévouement pour ses malades était légendaire et les infirmières et religieuses ont toujours travaillé sous ses ordres avec enthousiasme. Il est à peine besoin de parler d’honnêteté à son propos. Quant à sa simplicité, elle a fait l’objet de plus d’un témoignage. LAMBOTTE fut aussi un patriote impeccable, reportant toujours sur son pays les distinctions qu’il récolta. Namurois d’origine, Bruxellois de naissance et Anversois d’adoption, il fut un parfait Belge et sa modestie endossait Ie hasard de l’heureuse et symbolique conjonction de ces trois citoyennetés. Dans son discours de fin de mandat de secrétaire général en 1989127, Jean-Jacques ROMBOUTS évoquait encore deux autres anecdotes, dont témoignent des documents photographiques.
Au début de l’année 1938, Albin LAMBOTTE est invité à effectuer des démonstrations opératoires à Marseille. Il descend alors vers le sud en voiture, accompagné de ses deux collaborateurs de l’époque, Jean VERBRUGGE et René ROMBOUTS. Le trio a rapporté de ce voyage un reportage photographique, dans lequel il est émouvant de percevoir la joie de collégiens en vacances des trois Anversois. La première anecdote ressort d’une photographie où Albin LAMBOTTE tient en main le livre des « Trois petits cochons ». Dans les conversations privées, il fut souvent question par la suite du « premier petit cochon ». Une autre photographie, non reproduite, montre, au bord de la route, Albin LAMBOTTE et Jean VERBRUGGE dans une posture évoquant celle du très célèbre « petit gars de Bruxelles ».
Albin LAMBOTTE se retrouva couvert d’honneurs. Il fut membre de la Société de Chirurgie de Paris, de la Société Belge de Chirurgie (il en fut président), de la Société Internationale de Chirurgie, de l’Association Française de Chirurgie, de la société de Médecine d’Anvers et de la Société Médico- Chirurgicale d’Anvers. L’Académie Royale de Médecine de Belgique l’a élu Correspondant régnicole le 25 juin 1921 et membre honoraire le 16 décembre 1939, tandis que l’Académie de Chirurgie de Philadelphie le faisait membre d’honneur. Il reçut le Doctorat Honoris Causa de l’Université Libre de Bruxelles. Ce serait être trivial et atteindre à sa modestie quasi proverbiale de dire qu’il ployait sous les décorations : il fut promu Chevalier de l’Ordre de Léopold II, on lui remit la Croix civique de première classe, il fut décoré de la médaille du Roi Albert, nommé commandeur de l’Ordre de Léopold, Grand Officier de la Couronne, Officier de la Légion d’Honneur. Il a d’ailleurs été chirurgien consultant du Roi Albert, qu’il vénérait. Preuve de l’estime dans laquelle le tenaient ses pairs, de nombreux orateurs de prestiges étaient présents à Ia manifestation jubilaire d’Anvers en 1935 ; énumérons les principaux et les plus connus de ces orateurs : René LERICHE, Ferdinand SAUERBRUCH, Fred ALBEE, Paul ALGAVE, Félix BERARD, Rudolf DEMEL, Paul DUPUY de FRENELLE, Pierre FREDET, Ernest William HEY-GROVES, Charles LENORMANT, Paul MATHIEU, Maurice PATEL, Gaston PICOT, Vittorio PUTTI, Henri ROUVILLOIS, Louis TAVERNIER et bien d’autres autorités mondiales.
Robert DANIS (1880-1962)
L’apport de Robert DANIS à la chirurgie opératoire des fractures a été majeur. Il est considéré avec Albin LAMBOTTE (1866-1955), Lorenz BOHLER (1885-1973) etGerhard KUNTSCHER (1900-1972) commeétant un des quatre grands précurseurs en matière d’ostéosynthèse128.
Robert DANIS est né à Audenaerde le 28 octobre 1880. Il fut diplômé Docteur en Médecine, Chirurgie et Accouchements en juillet 1904 à l’Université de Bruxelles.
Il devint Docteur spécial en Sciences chirurgicales en 1912 et Agrégé en 1914. Sa thèse doctorale, défendue en 1912, est consacrée aux anastomoses vasculaires et aux ligatures129.
En 1921, il devient chargé du cours de médecine opératoire avant d’être promu Professeur ordinaire (1923). Il futchirurgien chef de service à l’Hôpital Universitaire Saint-Pierre à Bruxelles et simultanément responsable de laclinique gynécologique. Il développa une technique de traitement radical du cancer du sein.
Ultérieurement, il s’est intéressé de plus en plus exclusivement à la chirurgie opératoire des fractures dans la ligne de LAMBOTTE mais avec une recherche de la stabilité de l’ostéosynthèse130. Il était peu favorable à l’utilisation de l’immobilisation plâtrée qui « ajoute une maladie à un accident »131. Il recommandait la fixation précoce et la réalisation d’un montage stable. Pour obtenir une stabilité durable, il introduit le concept de compression. Il observe que la compression doit rester modérée, sinon elle risque d’induire des phénomènes de nécrose. Il observe également que la compression axiale permettait d’obtenir la guérison de certaines pseudarthroses des os longs sans qu’il soit nécessaire de réséquer tout le tissu fibreux.
C’est lui qui constate que les fractures diaphysaires traitées par ostéosynthèse stable avec une compression modérée guérissent sans produire de cal exubérant, ce qu’il appelle la guérison « per primam » ou la « soudure autogène ».
Il développe des vis à large pans pour avoir une meilleure tenue osseuse que celle des vis de LAMBOTTE ainsi que des vis hélicoïdales à très large pan pour les fractures épiphysaires. Ce matériel est déjà présenté dans son premier livre paru en 1932132. Il développera son fameux coapteur en 1938, semble-t-il. Il s’agit d’une plaque comprenant un trou ovale permettant le déplacement d’un fragment par serrage d’un boulon solidaire à la plaque et prenant appui sur la vis fixée à l’os dans le but de rapprocher les fragments fracturaires.
Le point faible de cet implant est la rainure de centrage. D’autre part, le concept imposant la traversée de sixcorticales par les vis dans chaque fragment a, au début, été négligé. Il en a résulté des défaillances illustrées ci-après (coll. RR).
Robert DANIS a développé une classification des fractures de la cheville133 qui a longtemps été utilisée et est devenue la classification de « DANIS-WEBER ». Il fut nommé Président de la Société Belge de Chirurgie en 1928134. Il avait été élu correspondant régnicole de l’Académie Royale de Médecine de Belgique le 26 novembre 1932 et membre titulaire le 28 juin 1947 (troisième section). Robert DANIS est décédé à Bruxelles le 3 juillet 1962. Il était Docteur honoris causa des Universités de Paris et Strasbourg et membre de la Société Royale des Sciences Médicales et Naturelles de la Ville de Bruxelles, de la Société Internationale de Chirurgie, de l’Association française de Chirurgie et porteur de bien d’autres titres encore.
ll fut l’un des pionniers et des novateurs de la chirurgie des fractures. Il joua un rôle majeur dans les progrès réalisés à cette époque en pathologie digestive, vasculaire et mammaire.
En 1953 Albert DUCHENE135 de Liège reprendra le concept d’impaction des fragments fracturaires avec une instrumentation originale. Georges DESENFANS136, lors de la séance de la SOBCOT du 18 avril 1953, lui répond en évoquant la possibilité de distraction avec ce matériel, 30 ans avant ILIZAROV ! Tous ces concepts de compression et de guérison « per primam » feront les beaux jours de l’Association for the Study of Internal Fixation, l’AO suisse d’abord, la Fondation AO ensuite et l’AO international enfin137. Dans le subconscient des orthopédistes, tous ces concepts sont attribués à Maurice MÜLLER de Berne mais il convient de rendre hommage aux précurseurs qui ont travaillé et inventé dans notre pays.
Jean VERBRUGGE (1896-1963)
Bien que chaque chirurgien orthopédiste utilise régulièrement les daviers de VERBRUGE, la personnalité de ce pionnier de l’orthopédie a été peu évoquée : un mot dans le livre de Jean- Pierre RAZEMON sur l’histoire de la Société Française d’Orthopédie138 et une simple citation dans le livre jubilaire de la Société Belge de Chirurgie Orthopédique et de Traumatologie139. Les Acta Orthopaedica Belgica ont publié, en 1964, les minutes de la séance d’hommage de la Société Belge d’Orthopédie à son ancien président : on y lit l‘histoire d’une école et la vie d’unmaître 140,141,142,143. Sa nécrologie publiée dans la Revue de Chirurgie Orthopédique a été rédigée de la plume de Robert MERLE d’AUBIGNE : «Ardent patriote, typiquement Belge, typiquement Flamand et fier de l’être, il transporta dans le monde cette bonhomie familière et bienveillante si caractéristique, cet accent que certains l’auraient accusé d’entretenir mais qui faisant si sûrement partie de son charme»144.
Son père, fier mouscronnais, était un sportif accompli, particulièrement versé dans l’éblouissante science de l’escrime : sa réputation l’avait mené à la fin du 19e siècle à Sofia pour y enseigner ce sport à l’Académie Militaire. Au lycée français de la même ville, une sémillante institutrice, originaire du bon pays gaumais, enseignait la langue de Racine. Elle rencontra le brillant maître d’arme et… de leur union naquit Jean VERBRUGGE, bien loin de chez nous.
Jean VERBRUGGE est donc né à Sofia, en Bulgarie, le 16 décembre 1896 Il a terminé ses études secondaires au lycée d’Anvers. Il conquit son diplôme de « Docteur en Médecine, Chirurgie et Accouchements » à l’Université de Bruxelles en 1921. A l’époque, il n’y avait pas d’enseignement universitaire en néerlandais. Ce diplôme en poche, il partit pour les Etats-Unis, où il passa deux années à la Mayo Clinic comme boursier de la CRB EducationalFoundation145. Bénéficiaire de cette bourse prestigieuse, Jean VERBRUGGE s’est attaché en retour dès les années 1920 à renforcer les échanges d’information entre la Belgique et les Etats-Unis146. Il y noua avec les orthopédistes américains de solides amitiés. Ensuite il se rendit à Bologne chez Vittorio PUTTI, puis à Strasbourg, où il était auprès de LERICHE. Son véritable maître fut Albin LAMBOTTE, dont il fut l’assistant puis l’adjoint et dont il reprit la charge de chef de service.
De 1926 à 1945, Jean VERBRUGGE fut médecin adjoint puis médecin superviseur de la « Commissie van Openbare Onderstand » à Anvers ; il fut Membre du Conseil Supérieur (Hogere Raad) de la Ligue Nationale Belge de Luttecontre le Cancer (Belgische Nationale Liga tegen Kankerbestrijding). Il est membre de la Société BeIge de Chirurgie, de I’Association Française de Chirurgie, de I’Association Française d’Orthopédie, de la Société Belge des Accidents de Travail, de la Société Internationale de Chirurgie et de la Société Internationale d’Orthopédie.
Il fut membre d’honneur de la Société d’Orthopédie de Bordeaux dès 1931 et de la Société de Chirurgie de Marseille. Deux ans plus tard, il devint membre d’honneur de la Société de Chirurgie de Lyon et de la Société de Chirurgie de Buenos Aires” (Argentine), ainsi que de la Société de Chirurgie de Sao Paulo (Brésil).
En 1945, il quittera sa chefferie de service des hôpitaux d’Anvers pour entamer une carrière académique, qu’il avait préparée en défendant une thèse d’agrégation dès 1936147 – son travail expérimental sera évoqué dans le chapitre sur la recherche en orthopédie. Il a été effectué au laboratoire de l’Institut BUNGE à Anvers. Reçu agrégé de l’enseignement supérieur le 3 juin de cette année-là, il est nommé chargé de cours d’orthopédie et de physiothérapie à l’Université de Gand par Arrêté du Régent du 8 mars 1946. La procédure de nomination dans une université d’Etat passe en effet par un texte légal. Les cours dont il est chargé comportent la physiothérapie (parties autres que la radiothérapie, partim) ; l’électrologie, l’actinologie, l’hydrologie et la climatologie (pour les médecins hygiénistes) ; la gymnastique normale et médicale et … l’orthopédie pour les médecins hygiénistes.
En 1945, il est fait membre d’honneur de la Sociedad Latino-Americana de Ortopedia y Traumatologia et en 1946, il est membre correspondant de l’American Academy of Orthopedic Surgeons, et membre d’honneur de la C.R.B. Educational Foundation. Un Arrêté du Régent du 1er septembre 1949 le porta enseignant à titre honorifique et un Arrêté Royal fit de lui un professeur ordinaire le 29 septembre 1951.
Par Arrêté du Régent du 12 mars 1948, le cours facultatif d’Orthopédie lui fut confié. Il développa unenseignement de qualité à l’Université de GAND. Ses notes de cours ont été publiées en 1957148 avec une préface de Sir Reginal WATSON-JONES.
C’est donc en 1925149 que Jean VERBRUGGE avait rejoint Albin LAMBOTTE, le Maître d’Anvers, dont il développa les techniques et l’instrumentation. L’école anversoise accueillit dès 1934 René ROMBOUTS, Jean MASSA et Jean CRAHAY, qui furent dispersés par la guerre et plus tard Georges DESENFANS qui fonda la traumatologie minière à Charleroi150. L’école de VERBRUGGE à Gand a formé Hendrik (Rik) CLAESSENS, Adhémar DE WULF et d’autres. « VERBRUGGE et ses assistants travaillaient avec des gants blancs en filoselle. Après incision de la peau, les muscles étaient écartés par un petit onglet, – le doigt du chirurgien –, le foyer de fracture était mis à nu, chaque fragment était saisi dans un davier en vue de la réduction, dont un troisième davier assurait la contention, une plaque saisie par une pince porte-plaque, était placée à cheval sur le foyer de fracture et solidement maintenue par trois vis sur chaque fragment. Une fois la peau suturée, VERBRUGGE était fier de montrer un montage solide en mobilisant le membre… »151.
Jean VERBRUGGE a présidé la Société Belge de Chirurgie Orthopédique de 1938 à 1945 et une seconde fois en 1962 après avoir présidé la Société Belge de Chirurgie en 1959. Son discours de 1945152 est prononcé devant 18 membres le 30 juin de cette année particulière qui a vu la renaissance de la société après cinq ans de carence. Il évoque les effrois de la guerre et en particulier la disparition tragique d’Adolphe MAFFEI et justifie l’interruption des activités des sociétés scientifiques médicales belges pendant la guerre. Il a des propos très sévères vis-à-vis de l’occupant qui a mené une politique d’étouffement des progrès de la science pendant cinq années. Il termine par un plaidoyer en faveur de la création de services universitaires d’Orthopédie.
Sa contribution au développement de la spécialité a été majeure153 et elle se situe dans la ligne de son maître LAMBOTTE. En1933, il est rapporteur à la Société Belge de Chirurgie sur les pseudarthroses et à la Société Belge d’Orthopédie sur l’hallux valgus. En 1939, il est à nouveau rapporteur avec ses élèves René ROMBOUTS et Jean MASSA sur l’« Ostéosynthèse métallique chez l’enfant ». Sa bibliographie compte 127 références dont 70 ont étépubliées avant la guerre154.
Il fut aussi éditeur correspondant pour le Journal of Bone and Joint Surgery dans ses deux éditions, américaine et anglaise, ainsi que de la Revue de Chirurgie Orthopédique et de l’Appareil Moteur (Paris).
Il faisait partie du conseil scientifique de la revue médicale belge « Le Scalpel »155 (publiée de 1848 à 1971).
Edouard VANDER ELST dans son évocation de 1964156 décrit de façon attachante la personnalité de Jean VERBRUGGE. C’était un sportif accompli et dans la ligne tracée par son père, il a été membre de l’équipe olympique belge d’escrime en 1923.
Voici en quels termes VANDER ELST parle : « Jean VERBRUGGE fut un talentueux violoniste plus d’une fois sollicité pour des concerts privés. Voyageur inlassable, ses pérégrinations l’ont mené autour du monde, et à plusieurs reprises dans les Amériques. Jamais, il n’omettait de crayonner ce qu’il voyait et observait. Et les souvenirs et les croquis de s’amonceler, témoins fidèles d’un coup de crayon incisif. Il fut aussi, à ses rares moments perdus, un archéologue en puissance. En effet, durant les dernières années de sa vie, il put acquérir en pays gaumais une maison de campagne. Explorant les alentours, il fut à l’origine de découvertes archéologiques de l’époque romaine qui sont conservées au musée gaumais dont il assura la présidence jusqu’à ses derniers jours. »
« Un certain jour, devant rendre visite à une enfant malade, il se trouve rendu, mais s’aperçoit, impardonnable distraction que sa bonté ne peut tolérer, qu’il arrivait les mains vides. Par bonheur, un magasin de jouets très proche le dépanne. VERBRUGGE entre et choisit une petite vache en porcelaine et, rasséréné, s’en va vers sa petite patiente. Les préoccupations de son art ayant repris le dessus, Jean VERBRUGGE se retrouve le soir, la petite vache toujours en poche. Un peu attristé sans doute par sa distraction, il la dépose sur son bureau de façon à ne pas l’oublier lors de sa prochaine visite. Le lendemain, sa mère trouve la vache et, croyant son fils devenu subitement collectionneur de bibelots, s’en fut incontinent acquérir un autre exemplaire. VERBRUGGE... n’osa la détromper, et voilà l’origine d’une collection de vaches de tous genres, à laquelle ses amis, même les plus lointains, ont collaboré: en effet, il avait feint d’afficher une soudaine et passionnante manie de collectionneur. Il en eut 175 exemplaires dont un des plus beaux lui fut donné par un ami américain qui l’avait fait couler tout exprès à Murano. C’était en 1937 La fin de l‘histoire : un club de vacheliers fut fondé qui devait devenir un réseau de la Résistance à Anvers. »
Les années de guerre éprouvèrent l’école orthopédique anversoise, qui fut décimée. Jean-Jacques ROMBOUTS est né à Anvers le 6 décembre 1941 alors que son père, René ROMBOUTS, associé de Jean VERBRUGGE venait d’être arrêté par la Gestapo. Jean VERBRUGGE, le patron, le maître, sut être présent et fut d’un grand soutien pour la jeune femme et son enfant. Une note manuscrite adressée à Madame ROMBOUTS témoigne de l’humour affectueux de VERBRUGGE : il propose d’introniser le rejeton « vachelier »157.
« Pour Jean VERBRUGGE, tout au long de sa vie, le culte de la famille a été par-dessus tout, une constante et majeure préoccupation. Tant qu’il vécut, Jean VERBRUGGE ne cessa de manifester une filiale vénération pour son père, dont il devait se montrer un digne successeur en matière d’escrime Il s’était marié sur le tard : il ne pouvait s’empêcher de parler de sa « charmante jeune femme » et de son adorable petite fille158.
Jean DELCHEF (1882-1962)
Jean DELCHEF159,160,161,162 fut pendant la première moitié du XXe siècle un des promoteurs majeurs de l’orthopédie belge.
Jean DELCHEF est né en 1882. Elève très brillant, il sera nommé aide-préparateur au laboratoire du professeur Léon FREDERICQ à l’Université de Liège de 1903 à 1907 et restera toujours plein d’admiration et de respect pource grand maître. Classé premier au concours interuniversitaire des bourses de voyage en 1908, il acquerra sa formation de spécialiste en Allemagne et en Autriche, dans les services des professeurs Adolf LORENZ, Oskar VULPIUS et Fritz LANGE.
Sa discipline classique et sa grande admiration pour la culture latine lui permettront de se faire beaucoup d’amis et d’admirateurs parmi les grands noms de l’orthopédie française. Cofondateur de la Société Belge d’Orthopédie et de Traumatologie en 1921, il fit partie de son Bureau et en assuma la présidence trois fois (1930, 1931,1937). Sans cesse, il y est resté très actif et ses plus importantes contributions scientifiques ont toujours été publiées d’abord dans la revue de la Société. Il avait le talent de clore une discussion en faisant la synthèse de toutes les interventions et avec une diplomatie hors pair. Il savait rallier l’unanimité sur l’essentiel. Jean DELCHEF est un des fondateurs de la SICOT en 1928 à Paris, à l’Hôtel de Crillon. La « Société Internationale de Chirurgie Orthopédique et de Traumatologie » a été établie comme société de droit belge. Jean DELCHEF n’en fut pas seulement un des membres fondateurs : il en fut le secrétaire de 1929 à 1954 et le Président de 1954 à 1960.
La bibliographie de Jean DELCHEF, énoncée aux pages 631 à 640 du tome 28 (1962) des Acta Orthopaedica Belgica compte 147 références et rappelle qu’il fut pendant de longues années le rédacteur en chef de la revuemédicale belge générale « LE SCALPEL » et qu’il y publia entre 1921 et 1942 de très nombreux articles d’intérêt général et des chroniques d’actualité.
Le site descriptif du château de Neerijse163 situe l’ouverture de la Clinique de Neerijse en 1942. Auparavant, le bâtiment était loué à une congrégation religieuse qui y tenait un orphelinat. La période de gloire de la Clinique deNeerijse fut l’immédiat après-guerre. Jean DELCHEF y pratiquait l’orthopédie froide. De nombreux médecins sontvenus de toute l’Europe y compléter leur formation, en particulier des médecins hongrois, qui connaissaient l’institution du fait de la présence de Madame le Docteur HADJI comme adjointe de Jean DELCHEF. La clinique orthopédique de Neerijse disparaîtra pendant les années 1960, alors que se développait le service d’orthopédie de la KUL au Pellenberg.
Kasteel d’Overschie, Neerijse
Des chirurgiens orthopédistes, des médecins et des spécialistes de différentes disciplines se réunissaient pour les « Seconds samedi de Neeryssche » pour bénéficier de l’enseignement de Jean DELCHEF et de ses invités, personnalités notoires venues des pays voisins.
Jean DELCHEF164 a apporté une importante contribution aux problèmes de la tuberculose ostéoarticulaire165. Jeune orthopédiste, il analyse la différence entre scoliose et mal de POTT débutant. Il pratique sa première greffe vertébrale pour mal de POTT en 1918. Il communiquera sur ce dossier avec Marie DERSCHEID en 1921. En 1933, il défend qu’il ne faut pas opérer la coxalgie de l’enfant mais en 1947, il présente l’arthrodèse précoce avecun remarquable résultat. Il poursuivra ses travaux sur la tuberculose ostéo-articulaire jusqu’à la fin de sa carrière publiant en 1959 un remarquable rapport avec de MARNEFFE166.
Les travaux originaux présentés en hommage au Docteur Jean DELCHEF le 17 novembre 1962 donnent uneidée de son aura internationale et de ses centres d’intérêt. Après BLANKOFF, Sir Harry PLATT de Manchester traite de la sciatique, Matthias HACKENBROCH de Cologne présente l’ostéotomie varisante dans le traitement de la coxarthrose. Pierre INGELRANS de Lille discute la place et les résultats de l’arthrodèse sous-astragalienne extra-articulaire. Les frères JUDET présentent deux cents cas de mal de POTT traité par abord direct. Arthur Lewis EYRE- BROOK de Bristol discute les déformations squelettiques du pied bot varus équin congénital. A. BRANDENBURG de Tilburg discute le rôle des spina bifida occulta dans les douleurs lombairesbasses. J.L. PETIT de Bruxelles discute le genu valgum de l’enfant et Etienne DE DONCKER le traitement du pied valgus souple.
Sa longue bibliographie permet d’identifier ses collaborateurs et élèves avec lesquels il a publié entre 1927 et1959. On y retrouve Marie DERSCHEID-DELCOURT (1921), GERARD (1927), A. BAILLEUX (1932 et 1933), SŒUR (1936), J.L. PETIT (1939 et 1946), André WALCH (1947-1955), René ROMBOUTS (1947-1948), Etienne DE DONCKER (1947), GOOSSENS (1955), Robert de MARNEFFE (1959) Jean DELCHEF Junior et FALLA en 1959.
Jean DELCHEF eut la satisfaction de former son fils Jean DELCHEF junior, qui prolongera son activité pendant quelques années à la Clinique et qui devint secrétaire général de la SICOT.
Outre sa contribution à la prise en charge de la tuberculose ostéo-articulaire, il a fait connaître en EUROPE la méthode d’ABBOTT pour le traitement des scolioses.
René ROMBOUTS confectionnant un plâtre de scoliose
Parmi ses innovations qui n’ont pas résisté à l’usure du temps, il y a l’arthroplastie de hanche avec interposition de peau (1955), technique qu’il présentera comme alternative des prothèses acryliques des frères JUDET.
Jean DELCHEF et Neerijse, c’est une page de l’orthopédie belge au rayonnement de laquelle il a contribué de par sa personnalité entraînante et son éloquence naturelle.
Appendice 1 : Une collaboratrice hors du commun.
Olga HADJI (1888-1956) dont la carrière est évoquée par le Président BLANKOFF en 1956167 a été la collaboratrice de Jean DELCHEF à la Clinique Maritime du Coq-sur-Mer et puis à Neerijse pendant les années d’après-guerre. Née en Crimée, diplômée de l’Université de Genève en 1915 où elle a acquis sa formation dechirurgie orthopédique avec JENTZER, elle a été remarquée par RULOT qui représentait le ministère belge de l’intérieur lors d’une visite à la Société des Nations orientée vers le traitement de la tuberculose. Celui-ci la recommanda à Jean DELCHEF dont elle devint l’assistante en 1923. Elle présenta avec BAILLEUX un rapport sur les affections douloureuses du rachis en 1931. A la fin de sa vie, elle dût être amputée de l’index droit suite à une piqûre anatomique. DELCHEF souligne ses solides connaissances cliniques, un remarquable entraînementtechnique et un dévouement hors du commun. Elle a été récompensée par la médaille d’or de l’œuvre NationaleBelge de Défense contre la Tuberculose.
Appendice 2 : La Clinique de Neerijse
Le château de Neerijse168 a été acquis en 1735 par le baron Charles-Joseph d’OVERSCHIE, un descendant d’une vieille et importante famille de brasseurs hollandais. Les héritiers du baron ont dirigé durant plus d’un siècle le village de Neerijse. Quand en 1892 le château et les possessions familiales sont passés à son arrière-petite-fille Anne d’OVERSCHIE qui a épousé Comte Auguste de BETHUNE HESDIGNEUL. Leurs fils a d’abord loué lechâteau à des religieuses qui en firent un orphelinat et par après il a vendu le château en 1935 au baron GOFFINET qui a son tour en 1942 le loue à une organisation qui en a fait un hôpital. En 1983 le château vendu devient un hôtel-restaurant. En 2003, Barones SA achète le château, le rénove et y crée des appartements « château ».
Le site du château de Neerijse photographié le 01/06/2020
Pierre LACROIX (1910-1971)
Pierre LACROIX fut un chercheur productif, un enseignant brillant et un gestionnaire visionnaire.
Il est né à Farciennes en 1910 et a été promu docteur en médecine en 1933. De 1928 à 1935, il participe activement aux recherches dans le laboratoire de cytologie et de botanique de Victor GREGOIRE (1870-1938)169,170.
D’octobre 1933 à janvier 1936, il se spécialise en chirurgie dans le service de Georges DEBAISIEUX, puis en orthopédie aux Etats-Unis à Boston (Harvard Medical School) dans le service de Marius SMITH-PETERSEN (1886-1953).
Dès son retour en 1937, il est nommé chargé de cours et enseigne l’anatomie systématique cédée par Ernest VAN CAMPENHOUT, tout en développant une importante activité de recherche sur l’ostéogenèse. Il accède au titre de professeur ordinaire en 1941. En 1954, il est nommé chef de service d’orthopédie, titulaire d’une des premièreschaires de cette spécialité en Belgique.
Pierre LACROIX, c’est, avant tout, l’auteur d’un remarquable petit livre « L’organisation des os » publié d’abord aux éditions DESOER à LIEGE en 1949171, réédité à plusieurs reprises et traduit en anglais172 et diffuséinternationalement en 1951. Ce petit ouvrage de 230 pages est structuré en 16 chapitres. Il aborde tous les aspects de la biologie osseuse : la structure et la croissance des os longs, le rôle de la moelle osseuse, dupérioste et des cartilages de conjugaison. LACROIX postule l’existence d’une substance organisatrice inductrice de l’ostéogenèse, l’ostéogénine. Il étudie en particulier la virole périchondrale et décrit le fonctionnement du cartilage de croissance. Cette somme de connaissances sera à la base des nombreux travaux de recherche effectués dans son laboratoire entre 1950 et 1970. Ils sont détaillés dans le chapitre consacré à la recherche del’école louvaniste.
Au milieu des années 1950, Pierre LACROIX s’intéresse à l’épiphysiolyse de la hanche chez l’adolescent173. Sur base d’une étude anatomo-pathologique de la lésion dont l’étiologie reste inconnue, il a proposé de stabiliser le glissement épiphysaire en provoquant une épiphysiodèse du cartilage de croissance dysplasique par un curetage du cartilage dysplasique à travers le col fémoral. Les documents histologiques et les résultats cliniques ont fait l’objet d’une monographie publiée en 1963 chez Arscia et Masson174.
Pierre LACROIX, professeur d’anatomie, savait captiver l’attention de ses étudiants grâce à une éloquence théâtrale : on se souvient de ses descriptions de l’os sphénoïde sans illustration autre que son verbe.
Son cours d’orthopédie était succinct mais orienté vers l’essentiel.
Il a mis toute son énergie à créer le premier service universitaire de chirurgie orthopédique dont il fut nommé chef de service et titulaire de chaire en 1954. Il souhaitait que ce service soit non seulement une école de formation de technique professionnelle mais aussi le lieu où chacun trouverait les bases de la biologie osseuse qui le rendraient plus apte à comprendre les gestes médicaux et chirurgicaux qu’il était amené à poser chaque jour.
Sa carrière prit ensuite un développement administratif. Il devient gestionnaire de l’Hôpital Universitaire dont il est nommé directeur en 1961, de la Faculté de médecine de l’UCL dont il est élu doyen en 1963 et enfin conseiller scientifique de l’Université en 1969 avec la lourde charge d’imaginer l’avenir de la Faculté de Médecine de l’Université Catholique de Louvain après son déménagement hors de Flandre 175,176.
Il est décédé inopinément en 1971. Antoine DHEM lui a succédé pour l’enseignement en anatomie, André VINCENT pour la clinique orthopédique et le laboratoire y rattaché, Xavier AUBERT dans la fonction de conseiller scientifique et Jean-Jacques HAXHE dans celle de directeur médical des cliniques universitaires. Le laboratoire de recherche orthopédique sera confié, quelques années plus tard, à la direction de Léopold (Pol) COUTELIER.
Dans son allocution annuelle de 1971, le Président de la SOBCOT, Adhémar DE WULF rappelle que Pierre LACROIX a présidé la Société en 1968. Il avait organisé son congrès à l’Institut VESALE à Louvain. La Société a tenu uneséance d’hommage à Louvain le 17 juin 1972177. André VINCENT178 après avoir évoqué la personnalité et l’œuvre de Pierre LACROIX a introduit les orateurs de marque qui ont contribué à cette séance : Rodolfo AMPRINO de Bari, Paul BLAIMONT, P. HALLEUX, Pierre OPDECAM et Léopold COUTELIER de Bruxelles, Antoine DHEM de Louvain, Geoffrey BURWELL de Londres, Stanislas HAUMONT et Zacharie NGOMA de Louvain, Jean DURIEZ et B.FAULTRE de Berck-Plage, Robert MERLE d’AUBIGNE de Paris, Robert DUTHIE d’Oxford, Pierre DE NAYER son élève, Robert LITT et Jean MOYERSOEN de Liège, et bien sûr André VINCENT lui-même, Jacques GIBON et Jean-Pierre GHOSEZ ses collaborateurs.
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39 Il s’agit de la Société des Sciences Médicales et Naturelles de Bruxelles.
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101 Notice par R. BRUYNOGHE le 24 septembre 1955 (Bulletin de l’Académie).
102 Collectif. Livre jubilaire offert au Docteur LAMBOTTE par ses amis et élèves. VROMANT et Cie, Bruxelles 1936, p. 14.
103 VAN HEE R. MENDEZ DA COSTA P. Du scalpel au robot. Histoire de la chirurgie en Belgique de 1830 à 2018. Universa Press, Wetteren, 2018, p. 130.
104 Livre jubilaire, p. 15.
105 VAN HEE R, MENDEZ DA COSTA P. Du scalpel au robot, p. 364.
106 Livre jubilaire p. 15.
107 LAMBOTTE A. Sur l’Ostéo-Synthèse, la Belgique Médicale, 1908 ; 20 : 231-3. Cité par ANDRIANNE Y. et HINSENKAMP M. Aperçu historique du traitement des fractures. Apport de la chirurgie belge dans la naissance et le développement de l’ostéosynthèse. Rev. Med. Brux. 2011 ; 32 : S30-7.
108 Livre jubilaire p. 17.
109 BISACCIA O. et al. History of radiology applied to orthopaedic. Canadian Open Orthopaedics and Traumatology Journal 2016 ; 3(4) : 28-34.
110 LAMBOTTE A. L’intervention opératoire dans les fractures récentes et anciennes envisagée particulièrement au point de vue de l’ostéosynthèse. LAMERTIN éd., Bruxelles, 1907.
111 Albert HUSTIN (1882-1967) fut le premier à réaliser une transfusion de sang humain citraté le 27 mars 1914 à l’hôpital Saint-Jean à Bruxelles. Cela permit la transfusion indirecte, par opposition à la transfusion directe d’homme à homme. Il fut professeur à l’Université Libre de Bruxelles.
112 HUSTIN A. Discours prononcé à l’occasion du jubilé professionnel d’Albin LAMBOTTE. In : Livre jubilaire offert au Docteur Albin LAMBOTTE par ses amis et élèves. Vromant & C° éditeurs, Bruxelles, 1936, pp 23-27. La photo de LAMBOTTE reproduite en début d’article provient également de cet ouvrage.
113 Chirurgien français (1857-1929), pionnier de la chirurgie pulmonaire et cardio-vasculaire, ainsi que de l’anesthésie par rachianesthésie.
114 Médecin britannique (1856-1943) pionnier de la chirurgie, y compris la chirurgie orthopédique.
115 LAMBOTTE A. Chirurgie opératoire des fractures. Société Franco-Belge d’éditions scientifiques, 1913.
116 VAN HEE R, MENDEZ DA COSTA P. Du scalpel au robot. Histoire de la Chirurgie belge 2018 page 294
117 VANDER ELST E. Souvenirs sur Albin LAMBOTTE (1866-1955). Texte présenté à la Société Française d’histoire de la médecine à Paris le 8 décembre 1962 (7 pages dactylographiées).
118 Acta Orthop Belg. 1955 ; 21(2-3) : 393.
119 VAN HEE R, MENDEZ DA COSTA. Du scalpel au robot. Histoire de la Chirurgie belge 2018, page 290.
120 L’atelier du maître voir Acta Orthop Belg. 1955 ; 21(2-3) : 390.
121 VERBRUGGE J. Albin LAMBOTTE. Acta Orthop Belg. 1955 ; 21 (2-3) : 387-400.
122 SŒUR R. In memoriam Albin LAMBOTTE. Acta Orthop Belg. 1955 ; 21 (2-3) : 385-386.
123 VANNES R. Essai d’un dictionnaire universel des luthiers. Librairie FISCHBACHER, Paris 1932.
124 Les débuts de l’ostéosynthèse en Belgique. Volume édité à l’occasion du 50e anniversaire de la Société Belge de
Chirurgie Orthopédique et de Traumatologie 1921-1971. 1ère édition 1971.
125 Les débuts de l’ostéosynthèse en Belgique. 2e édition 1997.
126 DE WULF A. Evolution des idées d’Albin LAMBOTTE. In : Les débuts de l’ostéosynthèse en Belgique. 2e édition 1997.
127 ROMBOUTS J.J. Les adieux du secrétaire général, 28/01/1989. Recueil administratif de la SOBCOT.
128 HEIM U.F.A. The AO Phenomenon. ed. HANS HUBER – Bern, Gottingen, Toronto, Seattle, 2001, 248 pp.
129 DELOYERS L. Eloge académique du Professeur Robert DANIS (1880-1962). Mémoires 1965 ; V : 145-158.
130 VICHARD Ph., GAGNEUX E. Il y a 100 ans : les premiers pas de l’ostéosynthèse des fractures. Histoire des Sciences Médicales 1995 ; XXIX : 155-64.
131 DANIS R. Théorie et pratique de l’Ostéosynthèse. MASSON, Paris, 1949, p. 6.
132 DANIS R. Techniques de l’Ostéosynthèse. MASSON, Paris, 1932.
133 DANIS R. Techniques de l’Ostéosynthèse. MASSON Paris 1949 pp 133-165
134 LAMBERT E. Robert DANIS. Académie Royale de Médecine de Belgique. http://www.armb.be/index.php?id=2164 Consulté en février 2020.
135 DUCHENE A. Plaque d’ostéosynthèse réalisant l’impaction des fragments. Acta Orthop Belg. 1953; 19: 202-208.
136 DESENFANS G. Réflexions à propos de la plaque de DUCHENE. Acta Orthop Belg. 1953; 19: 209-210.
137 L’ “Association for the study of internal fixation” ou AO Foundation (AO en abrégé) a été fondée en 1958. Son his- toire est détaillée dans les pages dédiées aux relations internationales
138 RAZEMON J.P. Histoire de la Société Française d’Orthopédie, Masson, Paris, 1998.
139 Société Belge de Chirurgie Orthopédique et de Traumatologie. Les débuts de l’ostéosynthèse en Belgique. Volume édité à l’occasion du 50e anniversaire de la Société Belge de Chirurgie Orthopédique et de Traumatologie. Imprimerie des Sciences, Bruxelles, 1971.
140 DESENFANS G. Jean VERBRUGGE et sa technique. Acta Orthop. Belg. 1964 ; 30 : 595-598. 141 VANDER ELST E. Jean VERBRUGGE. Acta Orthop. Belg. 1964 ; 30 : 599-616.
142 JUDET R. Jean VERBRUGGE. Acta Orthop. Belg. 1964 ; 30 : 598.
143 VAN DER GHINST M. Séance d’hommage à la mémoire du Professeur Jean VERBRUGGE. Ouverture de la séance. Acta Orthop. Belg. 1964 ; 30 : 590-592.
144 MERLE d’AUBIGNE R. Jean VERBRUGGE (1896-1963). Rev. Chir. Orthop. 1964 ; 50 : 404-405.
145 Commission for Relief in Belgium, Fondation mise sur pied par l’ingénieur américain Herbert HOOVER, futur Pré- sident des Etats-Unis, pour aider la population belge pendant la première guerre mondiale. Après la guerre, elle intervint notamment dans les échanges universitaires entre les deux pays. (BESTOR. Commission for Relief in Belgium. https:// www.bestor.be/wiki/index.php/Commission_for_Relief_in_Belgium Consulté en février 2020).
146 RAPP S.M. Ghent University orthopaedists known for osteosynthesis, meniscus, spine advances. Orthopaedics Today Europe 2010 ; january/february: 18-17.
147 VERBRUGGE J. L’utilisation du magnésium dans le traitement chirurgical des fractures. Etude clinique et expéri- mentale. VROMANT et Cie, imprimeur-éditeurs. BRUXELLES 1936 (72 pp.).
148 VERBRUGGE J. Beginselen van orthopedische geneeskunde en fysicotherapie. Uitgeverij Ontwikkeling, Antwerpen, 1957 (404 pp.).
149 VAN HEE R, MENDEZ DA COSTA P.. Du scalpel au robot. Histoire de la Chirurgie belge 2018 page 294.
150 Wikipedia. Albin LAMBOTTE. https://fr.wikipedia.org/wiki/Albin_Lambotte. Consulté en novembre 2020.
151 DESENFANS G. Jean VERBRUGGE et sa technique. Acta Orthop. Belg. 1964 ; 30 : 595-598.
152 Allocution du président VERBRUGGE. Acta Orthop. Belg. 1945 ; 12 : 41-46.
153 MERLE d’AUBIGNE R. In Memoriam Jean VERBRUGGE. Rev. Chir. Orthop. 1964 ; 60 : 404-405.
154 Publications du Professeur Jean VERBRUGGE. Acta Orthop. Belg. 1964 ; 30 : 609-616.
155 Universiteit Gent. Jan Verbrugge. 1946. Liber memorialis (online). file:///C:/Users/Dany/OneDrive/Documents/ ORTHOPEDIE%20HISTOIRE/Jan%20Verbrugge%201946.pdf. Consulté en février 2020.
156 VANDER ELST E. Jean VERBRUGGE. Acta Orthop. Belg. 1964 ; 30 : 599-616.
157 ROMBOUTS J.J. Les adieux du secrétaire général. Recueil administratif. Acta Orthop. Belg. 1989 ; 55 (supp 1) : 32-38.
158 ROMBOUTS J.J. Les grands noms de l’orthopédie belge : Jean VERBRUGGE (1896-1963). Maîtrise Orthopédique 2008; 173 : 10-11.
159 Anonyme. Jean-Joseph DELCHEF. Acta Ortop. Belg. 1962 ; 28 : 2-4.
160 BAILLEUX A. In memoriam Jean DELCHEF. Acta Ortop. Belg. 1962 ; 28 : 616-640.
161 WYBAUW L. In Memoriam. Jean-Joseph DELCHEF. Acta Chir. Belg. 1962 ; 61 : 317-318.
162 In Memoriam Jean-Joseph DELCHEF. J. Bone Joint Surg. 1962 ; 44B : 950-952.
163 HEKATE erfgoedonderzoek. Kasteel d’Overschie met park en natuurgebied. https://uploads-ssl.webflow.com/ 5b76b58d74fffef9d60dfe7b/5d9312d6ce30ab64b8e6ad1b_1._Neerijse_kasteel_en_omgeving_beheersplan_def.pdf. Consulté en novembre 2020.
164 Avant la guerre, Jean DELCHEF résidait à BRUXELLES. Le recueil administratif de 1938 situe son adresse au 34 de la rue MONTOYER à Bruxelles.
165 BLANKOFF B. L’importante contribution de Jean DELCHEF aux problèmes de la tuberculose ostéoarticulaire. Acta Orthop. Belg. 1962 ; 28 : 624-630.
166 DELCHEF J, de MARNEFFE R. Le Traitement chirurgical des tuberculoses ostéoarticulaires (Rapport du XIIe Congrès
de l’Assoc. Belge de Chirurgie, 12-14 juin 1959, Bruxelles).
167 BLANKOFF B et DELCHEF J. Nécrologie du Docteur Olga HADJI. Acta Orthop. Belg. 1956 ; 22 : 660 - 661
168 N.V. BARONES. Château de Neerijse. http://www.kasteelvanneerijse.be/GeschiedenisFR.htm. Consulté en novem- bre 2020.
169 HAXHE J.J. (responsable du site). Histoire de la Faculté de Médecine [UCL]. Pierre LACROIX. https://www.md.ucl. ac.be/histoire/lacroix/Lacroix.htm. Consulté en novembre 2020.
170 Académie Royale de Médecine de Belgique. Pierre LACROIX. http://www.armb.be/index.php?id=3142. Consulté en novembre 2020.
171 LACROIX P. L’organisation des os. Ed. DESOER, Liège 1949.
172 LACROIX P. The organization of bones. Translated from the amended French edition by Stewart Gilder. London: J. & A. Churchill Ltd. London 1951 : 4.
173 VINCENT A. L’Orthopédie, cinquante ans d’histoire. in HAXHE J.J. Ed. 50 ans de médecine à l’UCL. Ed. Racine, Bruxelles 2002, pp. 363-373.
174 LACROIX P. L’épiphysiolyse de la hanche. Ed. ARSCIA, Bruxelles et MASSON et Cie, Paris, 1963.
175 HAXHE J.J. Si Saint-Luc m’était conté (1966-1996), Editions RACINE, Bruxelles 2001.
176 HAXHE J.J. op.cit. 2002.
177 Acta Orthop. Belg. 1973 ; 39 : 373-534.
178 Allocution du Professeur VINCENT, séance du 17 juin 1972. Acta Orthop. Belg. 1973 ; 39 : 375-378.